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    1. PRIÈRE##


PRIÈRE. DKl-INITiON

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quelque défaut accidentel ; tandis que la demande qu’on fait à Dieu de choses qui ne conviennent p ; is (petitio rei indecentis) ne conserve pas ce qui fait l’essence de la prière. Ibid., n. 5.

3. La prière, en tant que pelilin. est-elle un acte de la volonté ou de l’intelligence ? Suarez, sur ce point, partage l’avis de saint Thomas, de Cajetan et < ! < tons les thomistes : c’est un acte de l’intelligence, parce que, môme purement mentale, c’est une locutio. Ibid., c. m. n. (i. Ce que dit ici Suarez de la prière-demande ne vaudrait-il pas de toute prière ? et la véritable définition de la prière, de toute prière, même de |’ « oraison mentale », ne serait-elle pas celle de saint Grégoire de Nyssc : conversât io et sermocinalio cum Deo ? Et Suarez analyse brièvement le « langage intérieur i qui sert à la prière mentale : si l’on y fait bien attention, dit-il, un langage intérieur ne se fait pas autrement, et ne paraît pas humano modo pouvoir se faire autrement, que par la représentation ou image mentale des mots de nos langues coin ailles ; personne, en effet, et il est facile de s’en rendre compte, ne parle intérieurement qu’en exprimant mentalement des mots dans la langue qui lui est familière, Ibid., n. 13.

1. C’est du moins ce qui se passe ordinairement, au dire de Suarez. Ibid., C. iv, n. H. l’ourlant, même en Cette vie, même pour la prière de demande, l’homme ne peut il pas parler à Dieu en se servant d’un langage Intérieur dégagé de ces conceplibus verborum sensibi

Hum, de ces images mentales des mois de sa langue, a la manière des ailles ou des âmes « séparées 7 Su. ne/ le croit ; cela ne lui paraît pas Impossible, ni minieu leux, ni très extraordinaire. Ibid. Mais en quoi consiste

alors celle locutio pure SpirituallS ? C’eSl une chose

difficile à expliquer, il n’y a même rien de plus difficile.

Ibid., n. 1.

5. Mais parler à Dieu, vocalcinent OU mentalement, fût-ce par ce langage purement spirituel, est-il absolu ment indispensable pour qu’il y ait prière ? Il faut dis tinguer : au sens précis du mot, oui, la prière consiste à parlera Dieu formellement de quelque manière que ce soit ; au sens large du mol, non ; il peut y avoir prière sans locutio formelle, par ce qu’on pourrait appe 1er le langage du rieur. C’est ce qui se produit dans

la contemplation, in altissima contemplatione, lorsque

l’âme, dans un acte simple et quasi Intuitif, se rend présente à Dieu et se rend I >icu présent. et lui est I <- 1 1 < ment unie par le cour et s’absorbe, pour ainsi dire, tellement en lui qu’elle ne peut plus émettre la moindre parole. Ibid., I. ii, c.xii, n. 17. Telle serait, d’après Suarez, l’oraison i de silence » ou « dans le silence. doni parlent les myslici doclores nul spirituelles viri ; on pourrait dire, à la rigueur, qu’alors il se fait dans l’âme un silence in/rrniini et spirilualr ; mais, en cet étal. l’Ame n’est pourtant pas inerte : l’intelligence et la volonté continuent de s’exercer.

li. Faut-il aller plus loin et admettre, comme le font certains spirituelles viri in theologia muslica multum exercitati, qu’il peut arriver que l’Ame, dans l’oraison mentale ou dans la contemplation, cesse absolument toute opération tant de l’intelligence que de la olonté et néanmoins soit censée prier encore actuellement cl pratiquer une sorte d’éminente contemplation » ? ibid., n. I C’est ce qu’ils appellent l’oraison de silence OU le sommeil spirituel, pendant lequel l’esprit se tient éveillé ; il ne dit rien, mais il écoule ou attend « la réponse du Seigneur ». Ce silence ait eut if serait encore une prière, non plus une prière i actuelle. si l’on veut, mais au moins une prière « virtuelle « : le pauvre qui a demandé l’aumône et qui attend, ne peut-on pas dire qu’il demande toujours ? Ibid., n. I.

Suarez n’accepte pas ces I bénins : non, dans cet état, l’ame ne prie plus, parce qu’il ne peut v avoir de prière mentale sans un acte d’intelligence OU de volon té, n. 5. La prière mentale est actuelle ou elle n’est pas, n. <S. D’ailleurs, cette prétendue suspension volontaire de l’activité mentale est chose psychologiquement impossible : mens nunquam vocal omni actu. sed ab uno immédiate transit in alium. n. 11. « Quand l’homme se tait et n’entend pas encore la parole de Dieu, mais se tient dans l’attente, il est impossible qu’alors il soit vraiment vide de tout acte d’intelligence ou de volonté à l’égard de Dieu ou des choses divines, à moins qu’il ne pense à autre chose, ou ne dorme, ou ne soit extra se. » N. 22. Finalement, cependant. Suarez acceptera que cette attente silencieuse de la réponse divine soit encore une prière, a condition qu’on reconnaisse que ce silence attentif comporte des actes d’intelligence et de volonté : Quoi qu’il en soit de la question de savoir si ce mode de prière est Utile, opportun, a conseiller, il ne paraît pas douteux qu’il soil possible, pourvu qu’on ne le fasse pas consister in vacaitate et carentia omnis aetus intellecius rri miuntatis ; car alors il n’y aurait plus prière, mais « >M. N’. 23. Sur l’oraison de silence, on trouvera de très

beaux textes dans’Histoire littéraire du sentiment religieux en France de 1 1 Bremond, notamment des textes de François de Gugny, t. vii, p. 317-319 ; el dans son Introduction à In philosophie de In prière, notamment des extraits du i*. Grou. p. 225-227. Cf. aussi Jean Rigoleuc, Œuvres spirituelles. Paris. 1931, p. 163-183, qui renvoie lui-même, p. 166, au P. Vlvarea de Paz, au P. Louis Dupont, au P. Maximilicn S.ind rus il au P. de I. angle.

7. Enfin, peut on descendre plus bas encore et admettre qu’il existe une prière qui ne comporterait mèilie

pas ce minimum d’activité meni.de qu’on reconnatl

dans l’oraison de silence, l’attente silencieuse, autre nieiii dit l’attention ? L’&me prie t elle encore quand la distraction Involontaire ou le sommeil viennent la

surprendre pendant l’oraison mentale’.' On l’a

tendu, et

ici comment on l’explique : par la prière actuelle. attentive, l’Ame a été dune certaine

manière jointe et unie a Dieu ; or. tant qu’elle m

change pas d’elle-même cette attitude et ne se distrait pas volontairement, elle est censée demeurer dans la même disposition a l’égard de Dieu ; ci. me. en rah i et effet, on peut dire que la prière dure, bien que I d’Intelligence ou de volonté qui constitue la prièn

actuelle ait cesse d exister. Su. inI. op ni. |. M, c. xii, n.’.i. SuareC n’a pas de peine à montrer « pie l.i permanence d’un effet n’eut raine pas celle de s ;, cause : quand le mouvement qui produit de la chaleur ient a

cesser, bien que la chaleur persiste, on ne peu t pas dire

cependant que le mouvement continue (ormaliter,

mais tOUt BU plus ri rt un II 1er : ainsi en est-il de la prière : bien qu’on puise dire que la prière persiste nrlunliler

dans son effet (l’union a Dieu), elle ne dure pas cependant proprie et formaliter. Ibid., n lu. Il va sans dire que l’t union » a Dieu dont il s’agit, qui demeure pendant la distraction ou le sommeil, n’est pas l’union par la pensée et par l’amour ou par la pensée amoureuse ; ce n’est pas l’union - actuelle. mais seulement

habituelle : c’est l’amour qui subsiste au fond du cœur quand son objet a disparu du champ de la ionscience ; c’est le feu qui couve sous la cendre : egt inio.car nwiim vigilat Nous sommes ici dans le domaine de la subeoiiscience.

Suarez ne veut pas non plus, el, i plus forte raison. qu’on donne le nom de prière à certains états purement affectifs OU émotifs qu’elle peut produire en nous

cl qui peuvent subsister quand clic même a déjà a ssé Il arrive quime : me qui pensait a Dieu et l’aimait avec suavité éprouve de la distraction et pense à un objet qui n’a plus aucun rapport avec Dieu, mais conserve néanmoins, pendant cette distraction, eamdem sensus suavitatem et deleeiabilem affecium, 12 Que