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THOMAS D’AQUIN. LE THEOLOGIEN

Comm. in Péri Ilcrmeneias, in Post. Anal., in Physicam, in libr. De cœlo et mimrfo, De yeneratione (éd. léonine) ; in Metaphgslcam, éd. Cathala, Turin, 1915 ; m De anima, De sensu et sensalo, in Elhicam, éd. Pirotta, Turin, 1925-1934.

— Voir les études de Mgr M. Grabmann : Les commentaires de S. Thomas d’Aquin sur les ouvrages d’Aristote (Annales de l’Institut sup. de phil.). Couvain, 1914, p. 231-281. Ce travail a été refondu dans Die Aristotcleskommentare des hl. Thomas o. Aquin, dans Mittelalterlisches Geistesteben, t. i, 1926, p. 266-313.

U. Salman, Saint Thomas et les traductions latines des Métaphysiques d’Aristote, dans Archives d’histoire doctrinale et littéraire du Moyen Aye, t. Vil, 1932, p. 85-120 ; A. Dondaine, O. P., Saint Thomas et les traductions latines d’Aristote, dans Bulletin thomiste, Notes et communications, 1933, p. 199-213 ; Fr. Pelster, S. J., Die Uebersctzungen der aristotelischen Mctaphysik inden Werken des hl. Thomas u. Aquin, dans Oregorianum, t.xvi, 1935, p. 325-348, 531-561, t. xvii, 1936, p. 377-406 ; A. Mansion, Pour l’histoire du commentaire de Thomas sur la métaphysique d’Aristote, dans Revue néo-scolastiqæ t. xxvil, 1925, p. 280-295 ; E. Holfes, In expositionem S. Thomas super Metaphys. XII, dans Xenia thomislica, t. i, 1925, p. 389-410 ; De Corte, Thémistius et saint Thomas, dans Arch. d’hist. doctr. et litt. du M.-A., t. vii, 1932, p. 47-84.

R. Garrigou-Lagrange.

V. Signification historique de la théologie de saint Thomas. — On ne donnera pas ici un exposé d’ensemble de la théologie du Docteur angélique. Cette synthèse sera esquissée à l’art. Thomisme. Comme chacun sait, elle a incorporé aux données générales de la théologie de l’époque nombre de vues nouvelles de saint Thomas. Ce sont précisément ces points de vue nouveaux qui seront étudiés ici, en même temps que seront notées les résistances dont l’Ange de l’École a dû triompher pour les faire prévaloir.

Guillaume de Tocco a exalté la nouveauté de la doctrine de saint Thomas : novos in sua lectione movens articulos, novum modum… determinandi inveniens, novas reducens in determinationibus rationes. Vita S. Thomas Aquin., dans Acta sanct., 1. 1 martii, p. 661 F. Triple originalité de doctrine, de méthode et jusque dans la position des problèmes, qui ne peut être appréciée avec exactitude que par un long commerce avec les prédécesseurs et les contemporains de l’activité littéraire du saint docteur, ceux qu’il lit, complète et corrige au besoin, par la connaissance également du milieu social et scolaire où il a vécu. Tâche immense, dans laquelle la monographie spéciale précède et précédera sans doute encore longtemps la synthèse. Cf. O. Lottin, Pour un commentaire historique de la morale de saint Thomas, dans Rech. de théol. anc. et méd., t. xi, 1939, p. 270-285.

La nouveauté doctrinale du thomisme ne pouvait manquer de lui susciter, au sein même de la faculté de théologie, une opposition considérable. Dans le tableau qu’il a tracé de l’activité doctrinale du saint docteur, Tocco a laissé, sans doute volontairement, ce point dans l’ombre. Aussi s’attache-t-il presque exclusivement à montrer dans saint Thomas le défenseur de la vérité catholique, non pas seulement contre les Arabes et les Grecs, mais, par un étrange anachronisme, contre les fratricelles. Saint Thomas devient ainsi le précurseur de la miranda decretalis de Jean XXII. Loc. cit., p. 665 B. Tocco n’ignore pas sans doute le rôle du saint dans la défense des religieux mendiants. Ibid., p. 664. Mais pour lui, saint Thomas est avant tout l’adversaire d’Averroès et de la doctrine de l’unité de l’âme. L’opuscule De unitate intellectus prend ainsi à ses yeux une importance qui lui fait placer presque sur le rang des deux Sommes ce scriptum mirabile.

Par une erreur relevée depuis longtemps, Guillaume de Tocco a assigné à la lutte de saint Thomas contre l’averroïsme latin, une date antérieure à la controverse qui l’oppose aux maîtres séculiers pour la défense des

religieux mendiants : post hune errorem, écrit-il — il s’agit de celle des averroïstes — prsedictus doctor destruit alium de novo exortum. Ibid., p. 664 C. Le nom de Siger de Brabant s’est trouvé du même coup associé à celui de Guillaume de Saint-Amour, dont la polémique et la condamnation étaient reculées jusqu’au pontificat de Clément IV ; cf. F. Mandonnet, Siger de Brabant et l’averroïsme latin, t. i, p. 69. En réalité saint Thomas a participé à la défense des ordres mendiants durant le cours de ses deux séjours à Paris : contre Guillaume de Saint-Amour, pendant son premier enseignement (époque du Contra impugnantes), contre Gérard d’Abbeville, Nicolas de Lisieux et le groupe des « Geraldinos » durant son second séjour à Paris. Cf. P. Glorieux, La polémique contra Geraldinos, les pièces du dossier, dans Rech. de théol. anc. et médiévale, t. vi, 1934, p. 5-41 ; Contra Geraldinos, l’enchatnement des polémiques, ibid., t. vii, 1935, p. 129-155. C’est l’époque où saint Thomas écrit le De perfectione vitse spiritualis (dans sa double rédaction), le Contra retrahentes, le De ingressu puerorum in religione. Entre les deux ordres dominicain et franciscain, unis dans une défense commune, existaient cependant de graves divergences sur la pauvreté et aussi sur l’étendue de l’obéissance religieuse, objet de la consultation De secreto, au chapitre général des prêcheurs de 1269 ; cf. l’opuscule du même nom de saint Thomas, éd. Mandonnet, Opusc. omnia, t. iv, p. 497 ; sur la position franciscaine dans ce problème, cf. E. Longpré, Gauthier de Bruges et l’augustinisme franciscain, dans Miscellanea F. Ehrle, Rome, 1924. t. i, p. 201.

I. S. THOMAS ET SIGER DE BRABAXT. LA LUTTE

coiïTRE L’aristotêlisme ovtrê. — 1° Circonstances historiques. — Il est certain que l’activité de saint Thomas contre Guillaume de Saint-Amour précède de plus de dix ans sa polémique contre Siger. A-t-il néanmoins été en contact, dès son premier enseignement parisien, avec un mouvement averroïste ? Cf. A. Masnovo, / primi contatli di s. Tommaso con l’averroismo latino, dans Riv. di fil. neo scol., t. xviii, 1926, p. 4355 ; M. —M. Gorce, La lutte contra Gentiles à Paris, dans Mélanges Mandonnet, Paris, 1930, t. i, p. 59-63, qui voit même dans les débuts de la lutte contre l’averroïsme, l’occasion du Contra Gentiles. Les positions tout à fait négatives de Mandonnet (Siger…, t. i, p. 59-63) ont été défendues par D. Salman, Albert le Grand et l’averroïsme latin, dans Rev. des sciences phil. et théol., t. xxiv, 1935, p. 38-64 : le De unitate intellectus d’Albert (première rédaction, 1256) ne peut prouver l’existence d’un courant averroïste. Cependant « on trouve dès cette époque des doctrines hétérodoxes qui seront plus tard retenues par l’équipe des Siger de Brabant et des Boèce de Dacie ». Salman, art. cit., p. 48. Mais ces doctrines ne procèdent point de la synthèse d’Averroès, elles dépendent plutôt d’Avicenne ou d’Alexandre d’Aphrodise, dont l’entrée dans le monde latin est bien antérieure à celle d’Averroès. Cf. R. de Vaux, La première entrée d’Averroès chez les Latins, dans Rev. des sciences phil. et théol., t. xxii, 1933, p. 193-243.

Au surplus, saint Thomas n’a pas eu l’initiative de la lutte contre l’averroïsme latin. Pendant le carême de 1267, bien avant le retour à Paris de Thomas d’Aquin, saint Bonaventure avait pris position, dans ses Collationes de X prseceplis, contre les idées nouvelles ; cf. Opéra omnia, Quarracchi, t. v, p. 514. Il y reviendra l’année suivante avec toute la clarté désirable dans ses Collationes de donis. Coll. viii, t. v, p. 497. Dieu, explique le saint docteur, est tout à la fois principe de l’être, lumière de notre intelligence, ordre et rectitude de l’action. À cette triple vérité, s’oppose la triple erreur de l’éternité du monde, du déterminisme, de l’unité d’intellect. Liste plus complète d’erreurs en