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TENTATION


grave ex toto génère suo, c’est-à-dire n’admettant pas de matière légère ; quant à la tentation interprétative ou virtuelle, ils ont estimé en général que sa gravité dépend du degré d’imprudence. La première comporte une irrévérence de soi importante ; dans la deuxième il peut y avoir un degré assez bas de témérité et un recours à Dieu si atténué, qu’il est difficile, en certains cas, d’en faire plus qu’une faute légère. L’ignorance, le manque de délicatesse morale, une foi mal comprise, la légèreté diminuent du reste la gravité subjective des fautes.

Quand la tentation de Dieu vient d’un doute, elle s’oppose aussi à la foi ; une faute contre cette vertu est alors jointe à celle contre la religion. La tentation née de la présomption peut aisément être aussi contre la charité envers soi ou envers les autres (scandale).

D’après ces principes les modernes jugent un certain nombre de cas qui leur paraissent plus importants ou plus pratiques, comme ceux concernant la maladie (quand elle est grave, négliger tout remède sous prétexte que Dieu fera un miracle, est estimé péché mortel ; si elle est légère, faute vénielle) ou la prédication (ne pas se préparer convenablement pour un prêtre instruit, est déclaré véniel ; s’il s’agissait d’un ignorant et s’il y avait à craindre un sérieux scandale, ce serait mortel).

III. La tentation et le péché.

Il ne s’agit plus de la tentation de simple épreuve, mais de la tentation de i séduction », de la tentation origine et source du péché, sollicitation au péché humain. Plie est étudiée sommairement par la théologie morale dans l’un de ses traités généraux, celui De peccatis. Certains auteurs du reste passent très rapidement sur cette matière, la regardant comme du domaine de la théologie ascétique.

Nous ne donnerons ici que des indications assez brèves, renvoyant à divers articles de ce Dictionnaire où plusieurs des doctrines que nous résumerons ont été déjà étudiées.

1° L’origine du pèche" et ta tentation. — 1. Le péché, acte délibéré de la volonté, suppose un moment, aussi court soit-il, où s’est produite cette délibération. Il faut, pour qu’il se forme et qu’on en soit responsable, au moins un instant où, l’intelligence se rendant compte qu’une pensée, un désir, une action à faire ou en cours de réalisation est moralement mauvaise, est défendue par la loi de Dieu, la volonté y donne son adhésion, la choisit, tout au moins l’accepte sans s’y opposer. Avant le péché, il y a eu sollicitation au péché : c’est cette gollicii at ion. plus ou moins accusée, vive OU répétée, qui constitue la tentation.

2. Elle est dite tentation légère, si elle porte sur un Objet véniellement défendu ou sur un objet, constituant un péché mortel, mais la sollicitation n’étant elle-même que peu pressante. La tentation est grave, quand l’objet à la fois est matière grave et sollicite vivement la volonté au consentement.

Toute tent al ion vraiment effective est intérieure en

CC sens qu’elle est connue inl ellecl uelleinent, mais par

ce mot les moralistes entendent généralement uneten talion qui produit un effet appréciable sur les facultés sensibles et. par là. incline la volonté à s céder : la I en tation purement extérieure serait celle qui, présentée BU dehors du sujet, connue de lui, n’émeut, ni ne remue son Imagination et son appétit sensible.

.’{. Ions les hommes sont sujets atU tentations : en entrant au sei s l<e du Seigneur, il faut se préparer à la tentation, lîccll., ii, 1, prendre garde que l’on ne tombe en tentation. Gal., vi, l. La force et la fréquence des tentations varient extrêmement d’après les circons tant es personnelles, la nature des âmes, les caractères,

l’éducation, les milieux, les desseins de bieu ; iussi. » nne n’en ;, été excepté sauf Notre Seigneur, en

qui la tentation proprement intérieure était impossible, à cause de sa sainteté et de sa maîtrise divine sur ses facultés ; mais il a voulu, pour notre instruction, se soumettre à la tentation extérieure ; la bienheureuse vierge Marie, par une grâce spéciale de Dieu, a été préservée de la tentation intérieure ; quant à des tentations extérieures, autres que celles résultant des conditions générales de vie, nous ne voyons pas qu’elle y ait été soumise.

La tentation en elle-même n’est pas un mal ; c’est au contraire, comme le montrent avec insistance les auteurs ascétiques, un grand bien pour la vie spirituelle : il a été dit à Tobie : « Parce que tu étais agréable à Dieu, il a fallu que la tentation t’éprouvât », Tob., xii, 13, et saint Jacques a déclaré : « Heureux l’homme qui supporte l’épreuve ; devenu un homme éprouvé, il recevra la couronne de vie ! » Jac. i, 12.

4. On trouverait déjà dans la Bible l’indication des divers éléments, qui composent la tentation quand elle présente son complet développement et suit son cours entier : dès les premières pages de la Genèse, dans le récit de la tentation et de la chute de nos premiers parents, ses diverses phases sont clairement indiquées ; d’autres passages des Psaumes et des Livres sapientiaux compléteraient cette analyse. Mais c’est surtout depuis que la révélation chrétienne est venue si profondément intérioriser la vie humaine, que l’étude ds la tentation a pris toute son ampleur.

Déjà, dans les premiers écrits consacrés à la vie spirituelle, elle est un des thèmes, sur lesquels on revient sans cesse. Le texte de saint Jacques (i, 14-15) : « Chacun est tenté par sa propre convoitise qui l’amorce et qui l’entraîne ; ensuite la convoitise, lorsqu’elle a conçu, enfante le péché et le péché, lorsqu’il est consommé, engendre la mort », est un de ceux qui le plus souvent sert de point de départ à cette étude.

Avec saint Augustin et saint Grégoire-le-Grand, la littérature spirituelle s’arrête surtout à trois éléments successifs de la tentation : la suggestio, la delectatio, le consensus. D’autres analyseront plus encore ; donnons ce seul exemple tiré de l’Imitation. I. I, c. xiii : « Ce n’est d’abord qu’une simple pensée qui vient à l’esprit ; vient ensuite une vive imagination, puis le plaisir, un mouvement déréglé et le consentement. Ainsi peu à peu l’ennemi malfaisant envahit l’âme « litière, quand celle-ci ne lui résiste pas dès le début. >

Les auteurs ascétiques feront en outre remarquer que la sollicitation au péché peut revêtir des formes multiples : elle sera directe ou indirecte, brusque et soudaine produisant une sorte de choc et une. impulsion qui entraîne ou encore plutôt Insinuante et iusi (lieuse, provoquant une sorte de paralysie, qui endor mira la volonté.

Quant aux moralistes, ils ont une tendance à simplifier et à réduire les diverses phases de la tentation ; leur préoccupation étant surtout de déterminer où commence le. péché, ils se contenteront, quand ils poseront des principes moraux sur la tentation, de dis tinguer sentiment, comprenant iu reste le plaisir, et consentement. Nous reviendrons t ou t à l’heure sur cette division.

2° Les causes tics tentations : le démon, le monde cl

nous meutes. D’après la doctrine traditionnelle, ces

causes sont au noinhre de trois : les deux premières viennent de nos ennemis extérieurs, le démon et le monde : la troisième nous est purement intérieure, nous mêmes, notre propre nature humaine. I.e plus SOUVent elles s’unissent iu reste et agissent en se COITI binant.

1. Le iléutoit. a) Il est de foi divine quc le démon existe et qu’il tente les hommes. I.a Bible nous le pré sente, dès sou début, a l’origine de la I inl al ion I rop bien réussie de nos premiers parents, (.en., m. I ».