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EUCHARISTIE D’APRES LE CONCILE DE TRENTE


complications inattendues, le légat leur exposa en même temps ses perplexités. Que convient-il de répondre à la demande des protestants ? Si on ne les attend pas, bien qu’ils aient refusé jusqu’ici de répondre aux convocations qu’on leur a adressées, ce sera pour eux un motif de plaintes et un prétexte qui justifiera leur absence du concile ; si on les attend et que, cette fois encore, ils ne viennent pas, on aura perdu du temps et il en résultera pour le concile un certain ridicule. La commission a estimé qu’il était convenable d’accéder à la demande des protestants et de différer jusqu’au 25 janvier les canons sur la communion ; mais c’est aux Pères qu’il appartient de donner la décision définitive. Theiner, t. i, p. 521.

Les avis portèrent donc sur deux points : la réponse i faire aux protestants et le texte des canons. Sur le premier point, tous furent d’accord pour que l’on allât aussi loin que possible dans la voie des concessions. Sur le second, quelques modifications furent demandées ; on proposa, en particulier, de supprimer, dans le 2= canon, le mot impanalum qui n’est employé par personne ; d’ajouter au 3°^ les mots separalionc fada pour se conformer au texte du concile de Florence ; d’intercaler dans le 13 « ^ la restriction : habita copia confessarii.

Les retouches furent faites comme elles avaient été demandées. On supprima, de plus, les canons 8 et 10 pour faire droit au désir des protestants ; on fit de la fin du 7^ un canon spécial qui devint le 11^ et l’on obtint ainsi douze canons (texte dans Theiner, 1. 1, p. 525).

Le 9 octobre, en congrégation générale, quelques observations furent encore présentées ; Musso, évêque de Bitonto, répondit au nom de la commission ; il reconnut le bien-fondé de quelques-unes, et non des autres. C’est ainsi qu’il fit échouer divers amendements proposés au texte du dernier canon ; de Hérédia, évêque de Cagliari, eût voulu que l’on n’imposât pas la confession avant la communion « en cas de nécessité urgente, » Musso lui répondit que le concile devait porter des règles générales sans s’inquiéter des exceptions possibles ; Fonseca, évêque de Castellamare, désirait cette autre restriction : « quand il n’j' a pas à craindre de scandale ; » la même réponse sans doute lui fut faite.

Aussitôt après, la commission se réunit pour corriger une nouvelle et dernière fois le texte des canons ; il fut enfin définitivement approuvé le 10, dans une congrégation générale du matin. Theiner, t. i, p. 527.

Le soir cependant, un léger remaniement fut encore opéré ; le légat demanda aux Pères de réserver le canon sur la communion des enfants avec ceux qui concernaient la communion sous les deux espèces ; il en fut ainsi décidé, et l’on eut de cette manière onze canons sur l’eucharistie. Ibid., p. 528.

4. Rcdaclion et discussion des chapitres. — Les canons condamnent des erreurs sans exposer complètement la doctrine. Sur la demande de plusieurs Pères, demande formulée, par exemple, le 6 octobre, par Fonseca, évêque de Castellamare, et Jérôme de Bologne, évêque de Syracuse, Theiner, t. i, p. 522, on décida de continuer ce qui avait été fait sous Paul III et de faire précéder les condamnations d’un exposé doctrinal. La rédaction des chapitres, nous dit Massarelli, Theiner, t. r, p. 525-526, fut confiée à deux des membres de la commission, les évêques de Guadix et de Modènc ; mais la commission elle-même ne fut pas satisfaite du travail et, le 9 octobre, le légat dut le faire recommencer. Sarpi, op. cit., 1. IV, n. 13, et le continuateur de FIcury, Hist. ceci., 1. 147, n. 9, donnent à ce sujet des renseignements plus complets. D’après eux, le projet primitif contenait huit cha pitres qui traitaient de la présence réelle, de l’institution, de l’excellence et du culte de l’eucharistie, de la transsubstantiation, de la préparation à la communion, de l’usage du calice dans lu communion des laïcs et de la communion des enfants. Mais des discussions acharnées s'élevèrent entre dominicains et franciscains, c’est-à-dire entre thomistes et scotistes, sur la manière dont s’opère la transsubstantiation ; leurs subtilités, dit Sarpi, causèrent beaucoup d’ennuis aux prélats. Un remaniement s’imposait, soit à la suite de cette discussion que le concile ne voulait pas trancher, soit à cause de la décision que l’on avait prise dedilTcrerles matières concernant la communion sous les deux espèces. On demanda donc une nouvelle rédaction à quelques prélats et à quelques théologiens, sous la direction de l'évêque de Vérone, Lippomano ; on leur recommanda d’user d’expressions assez générales au sujet de la transsubstantiation pour qu’elles puissent être acceptées par toutes les écoles.

Le nouveau texte deshuitchapitres, ayant été adopté par la commission, fut soumis aux Pères, et ceux-ci exprimèrent leur avis dans les deux congrégations générales du 10 octobre. La discussion fut brève, les corrections demandées peu nombreuses et peu importantes ; la commission les opéra.

5. Définition.

Tous les préliminaires étant accomplis, il ne restait plus qu'à prononcer la définition solennelle ; on le fit dans la XIII^ session, le dimanche Il octobre 1551. L'évêque de Majorque, Jean-Baptiste Campeggio, chanta la messe, et Alepo, archevêque de Sassari, prononça un discours latin sur l’eucharistie. Après la cérémonie, on reçut les envoyés de l'électeur de Brandebourg ; puis l'évêque de Majorque promulgua les chapitres et les canons sur l’eucharistie et les décrets de réforme. L’archevêque de Sassari monta ensuite à l’ambon et lut le décret qui prorogeait la définition de quatre articles sur la communion et qui accordait un sauf-conduit aux protestants ; enfin le légat donna la bénédiction à l’assistance, et tous se retirèrent, dit Massarelli, heureux et remerciant Dieu de ce qu’il avait uni les cœurs dans une telle concorde. Theiner, t. i, p. 530.

A cette session assistaient « le légat et les présidents, le cardinal de Trente, les trois archevêques électeurs, trois orateurs de l’empereur, deux du roi des Romains et deux de l'électeur de Brandebourg, cinq archevêques, trente-quatre évêques, trois abbés, cinq généraux d’ordre, quarante-huit docteurs et maîtres en théologie, tant séculiers que réguliers, et quarante nobles et barons. » Theiner, ibid.

6. Les canons contre les abus.

Dès 1547, à Bologne, on s'était occupé de divers abus trop fréquents dans l’administration et le culte de l’eucharistie. Les suivants avaient été surtout signalés : dans certaines églises, on ne conservait pas la sainte eucharistie ou on ne le faisait pas avec la décence voulue ; quand on la portait dans les rues, il arrivait que les passants ne s’agenouillaient pas ou même ne se découvraient pas ; parfois on gardait si longtemps les saintes espèces sans les renouveler qu’elles se corrompaient ; en certains pays, les communiants ne couvraient pas leurs mains d’un linge ; ailleurs, ils étaient tellement ignorants qu’ils ne savaient ni la dignité du sacrement qu’ils recevaient, ni son efiicacité ; on admettait à la communion des concubinaires, des débauchés, des gens qui ne connaissaient ni Pater, ni Ave ; quelquefois on faisait payer la communion. Sarpi, op. cit., 1. IV, n. 13.

Pour réprimerces abus, cinq canonsavaientété dressés. Voir le texte dans Raynaldi, Annales, an. 1547, n. 73, et dans Le Plat, t. iii, p. 637. Ils édictaient les prescriptions suivantes : 1. Devant le saint sacrement, même lorsqu’on le porte dans les rues, personne