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EUDES


elle est placée, dans chaque paroisse, sous la direction d’un prêtre qui doit être, autant que possible, désigné par le supérieur des eudistes, et qui préside les réunions mensuelles où il fait aux sociétaires un entretien de piété. Chaque groupe a de plus à sa tête un président ou présidente avec un assistant ou assistante.

Sous leurs habits ordinaires, les associés portent un petit habit symbolique qui se compose : 1° d’une tunique de laine ou de toile blanche de dimensions indéterminées ; 2° d’une ceinture de soie blanche ; 3 » de deux cœurs de soie rouge, surmontés de croix, dont l’un est transpercé d’un glaive. On porte la tunique pour honorer l’immaculée conception de la sainte Vierge ; la ceinture, pour honorer sa maternité et sa virginité ; les deux cœurs pour honorer les souffrances des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie. On croit que cet habit fut indiqué au P. Eudes par la sainte Vierge elle-même. Le Bienheureux le portait continuellement et il voulut en être revêtu jusque | dans le tombeau. Les sociétaires doivent aussi le porter constamment, et on a soin, après leur mort, de ne point les en dépouiller.

La Société du Cœur de la Mère admirable a toujours été très répandue en Normandie et en Bretagne, et elle y est encore florissante. Au dire de M. Souchet, qui fut longtemps le supérieur de la Société dans le diocèse de Saint-Brieuc, et qui a publié un bon commentaire de la règle, elle comptait encore 25 000 membres vers le milieu du xix'-e siècle. Elle a rendu d’immenses services pendant la grande Révolution, et aujourd’hui que les congrégations religieuses sont dispersées ou bannies, elle peut encore en rendre de bien grands dans les paroisses où elle est établie.

Ajoutons que cette pieuse société a donné naissance à plusieurs congrégations religieuses ferventes, parmi lesquelles nous pouvons citer les Filles des Saints Cœurs de Jésus et de Marie de Saint-Quay-Portrieux, et la Congrégation des Sacrés Cœurs de Paramé.

III. Ouvrages.

Le P. Eudes ne fut pas seulement un infatigable missionnaire dont la parole ardente attirait et convertissait les foules, un émule de saint Vincent de Paul et de M. Olier dans la réforme du clergé et l'établissement des séminaires, un apôtre zélé de la dévotion aux Sacrés Cœurs et le fondateur de plusieurs instituts florissants : il fut encore l’nn des écrivains ascétiques les plus féconds et les plus remarquables du xviie siècle. L’ensemble de ses ouvrages formerait une somme complète d’ascétisme et de pastorale. Malheureusement, plusieurs d’entre eux, restés manuscrits, sont aujourd’hui perdus. On les conservait au séminaire de Cæn avant la Révolution ; depuis cette époque, ils ont disparu, et tous les efforts tentés pour les retrouver sont demeurés infructueux.

Voici la liste des ouvrages perdus de la sorte : L’homme chrétien ; Tout Jésus, ouvrage divisé en douze livi’es ; L’office divin ; Le sacrifice admirable de la sainte messe ; Sermons du Bienheureux reliés en trois volumes ; Médiledions, en trois tomes ; Les faveurs faites par la sainte Vierge à l'Église de Coutances, ouvrage resté inachevé ; La divine enfance de Jésus ; La dévotion au Cœur adorable de Jésus-Christ ; La vie admirable de Marie des Vallées ; la correspondance du Bienheureux.

Heureusement cpie le P. Eudes avait fait imprimer lui-même une partie de ses ouvrages, et que son successeur, M. Blouct de Camilly, en publia plusieurs autres après sa mort. A part un opuscule intitulé : Le testament de Jésus, qui n’a pu être retrouvé jusqu' ; ' » ce jour, tous ces ouvrages nous restent et les fils du Bienheureux viennent d’en achever hi réédition. Leur ensemble ne forme pas moins de 12 in-8°.

Plusieurs d’entre eux ont eu, dans le temps, un grand succès, et tous les écrivains qui ont eu occasion d’en parler, même ceux qui, comme Huet, Moréri et l’abbé de la Rue, ne furent pas toujours favorables à l’auteur, en ont loué la piété et l’onction : Piissimse et utilissimse scriptiones, c’est ainsi que Huet les apprécie dans ses Mémoires. Les ouvrages du P. Eudes sont, en effet, remarquables par la richesse et l'élévation de la doctrine. Le style en est simple, quoique parfois relevé par de fortes images. Un peu diffus dans le Cœur admirable, il est alerte et souvent d’une admirable précision dans les ouvrages de moindre étendue. Le P. Eudes excelle à condenser en quelques pages toute une théorie ou tout un programme de perfection chrétienne et sacerdotale. A ce point de vue, certains passages de l’Exercice de piété et du Mémorial de la vie ecclésiastique, pour ne parler que de ces deux opuscules, sont de vrais chefs-d'œuvre. Bien que la langue du P. Eudes soit un peu vieillie, sa diction généralement simple et naturelle rend la lecture de ses livres plus facile que celle de la plupart des écrivains de la première moitié du xiiiu'e siècle.

Voici, par ordre de publication, la liste des ouvrages du Bienheureux que nous possédons : 1° Exercice de piété, contenant en abrégé les choses principales qui sont nécessaires pour vivre clrrétiennement, Cæn, 1636. C’est un petit livre in-32, destiné au commun des fidèles. Beuvelet le recommandait aux prêtres. Il a été souvent réédité, et encore aujourd’hui les religieuses de Notre-Dame de Charité en font le manuel de leurs pénitentes. — 2° La vie et le royaume de Jésus dans les âmes chrétiennes, in-12, Cæn, 1637. Cet ouvrage est l’un des meilleurs qui soient sortis de la plume du P. Eudes. C’est un commentaire pratique de la parole de saint Paul aux Galates, ir, 20 : Vivo autem, jam non ego, vivil vero in me Cliristus. D’un bout à l’autre de l’ouvrage, le Bienheureux vise à vulgariser cette idée que la vie chrétienne n’est que la vie de Jésus en nous, et il s’efforce de montrer comment on peut la réduire en pratique dans le détail de la vie, en faisant ses actions « en Jésus et pour Jésus. » Si l’on veut connaître la spiritualité du P. Eudes, c’est ce livre surtout qu’il faut étudier. Aussi le Bienheureux voulait-il qu’on le mît entre les mains des novices de sa congrégation, et qu’on leur en recommandât beaucoup la lecture et la pratique. C’est leur livre de formation. Il faut avouer d’ailleurs qu’il serait difficile de trouver un meilleur livre pour s’initier à la vie intérieure. Du vivant du P. Eudes, le Roycmme de Jésus fut souvent réédité, et on le réimprime encore de nos jours. Les éditeurs des Œuvres complètes en signalent une vingtaine d'éditions. — 3° La vie du clirétien, ou le catéchisme de ta mission, in-16, Cæn, 1642. Le Bienheureux faisait faire le catéchisme tous les jours dans ses missions, et c’est dans le but de mettre entre les mains des enfants un manuel facile à apprendre et ii retenir qu’il composa son catéchisme. ( ; 'est l’un des premiers ouvrages de ce genre qui aient paru en France, et il est compté parmi les plus pieux et les ]ilus pratiques. Le Catéchisme de la mission eut au moins 17 éditions. — 4° Avertissemerds aux confesseurs missionnaires, avec la manière de bien examiner les pénitents et de les aider à faire une bonne confession, in-32, Cæn, 1644 ; A^ édit., 1660. Le P. Eudes composa cet ouvrage pour servir de guide aux prêtres qui l’accompagTiaient dans ses missions et établir imrmi eux l’uniformité de conduite au tribunal de la iJéniteiice. L’auteur s’est inspiré à la fois des Avertissements cnix confesseurs de saint François de Sales et ties Instructions de saint Cliarles Borromée. A la charité et ; la douceur de l’un, il demande qu’on unisse la fermeté de l’autre, en sachant, quand il le faut, différer l’absolution. Dans