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EUCHARISTIE DU IX" A LA FIN DU XP SIÈCLE


Ecdesise dodores in principio adnoiarc, ex quibus pauca de pluribus quasi lac teneriludinis eliquaverimus : Cyprianum scilicel, Ambrosium, Hilarium, Augiistinum, Joannem, Hieromjmum, Grcgorium, Isidorum, Isicium et Bedam, quorum doclrina et fide imbutus melius possis ad alliora proftcere. Il se réclame également de la liturgie, c. xii, n. 2, 3 ; c. xv, col. 1312. 13211324, et des miracles eucharistiques dont il trouve le récit dans les Vies des Pères du désert, dans saint Grégoire pape, etc., c. vi, n. 3 ; c. ix, n. 7-12 ; c. xiv, col. 1283-1284, 1298-1303, 1316-1321. Ceux qui vinrent après Paschase employèrent les mêmes arguments, mais la preuve patristique dut être revisée et complétée. Paschase s’était appuyé principalement sur saint Ambroise ; Ratramnc lui objecta saint Jérôme, saint Fulgence, surtout saint Augustin, dodor Ecdesiæ preecipuus, et s’efforça de tirer à soi saint Ambroise. De corpore et sanguine Domini, c. x.kiii-xcvi, P. L., t. cxxt, col. 140-162. Une grande discussion était ouverte sur le sens véritable de saint Augustin et de saint Ambroise ; les écrivains orthodoxes travaillèrent à montrer que les deux grands docteurs ne se contredisent pas et témoignent également en faveur du dogme eucharistique, mais qu’il faut savoir lire saint Augustin et éclairer ses formules obscures par des passages clairs, cf. Lanfranc, Liber de corpore et sanguine Domini, c. xviii, P. L., t. cl, col. 433-434, que ce’très noble docteur » , lequel scandali pêne totius videtur esse principium, étudié de près, n’offre nihil scrupulosum, nihil ambiguum, nam quidqu id ex eo pro se decerpunt id attente perspedum… aut pro nobis aut certe nihil contra nos facit. Guitmond, De corporis et sanguinis Domini verilate in eucharistia, l. III, P. L., t. cxLix, c)1. 1469, 1470. Paschase ouvrit la campagne dans sa lettre à Frudegarde ; il versa au dossier patristique des textes nouveaux. Malheureusement, un des plus importants, qu’il donnait comme extrait d’un sermon de saint Augustin Ad neophytos, col. 1352, était apocryphe, ce sermon étant « l’œuvre d’un inconnu du viii « ou du ixe siècle, qui avait utilisé les formules de la liturgie mozarabe. » J. Turmel, op. cit., p. 436. En revanche, il apportait, sous le nom d’Eusèbe d’Émesse, col. 1354, un texte qui paraît être de Fauste de Riez et qui est de toute première importance pour ce qu’il exprime et pour le crédit qu’il rencontra à partir du ixe siècle. Cf. P. Batiffol, Nouvelles éludes documentaires sur la sainte eucharistie, dans la Revue du clergé français, Paris, 1909, t. Lx, p. 537-540. L’épîtrc de Paschase fut un noyau patristique que grossirent des apports ultérieurs, modestes mais utiles, d’Hériger, de Durand de Troarn, de Guitmond, etc. Çà et là, cependant, l’apocryphe se glissa dans ces attestations. Les Actes de saint André, par exemple, sont cités par Hériger, De corpore et sanguine Domini, c. viii, P. L., t. cxxxix, col. 187, par Gérard de Cambrai, De corpore et sanguine Domini, P. L., t. cxLii, col. 1281, par Wolphelme de Brauweiler, Epistola de sacramento eucharistiæ contra errores Berengarii, P. L., t. cuv, col. 414, etc. Paschase Radbert avait eu le mérite. Liber de corpore et sanguine Domini, c. xx, n. 1, 3, P. L., t. cxx, col. 1330, 1331, de reconnaître le caractère apocryphe de la lettre de saint Clément à saint Jacques, mais sans nommer cet écrit. Durand de Troarn, Liber de corpore et sanguine Christi, c. x, P. L., t. cxlix, col. 1389-1390, loue Paschase et cite son passage sur l’apocryphe, puis, ne s’apercevant pas que cet apocryphe est la prétendue lettre de saint Clément, il cite cette lettre et veut établir qu’elle n’est pas en désaccord avec Paschase. L’érudition de nos écrivains n’est donc pas impeccable. Sachons-leur gré des résultats qu’ils obtiennent, d’autant plus qu’ils ne se bonient pas à enregistrer les textes ; ils tentent de les

expliquer en les rapprochant les uns des autres et en les plaçant dans le contexte. Leur critique est parfois sommaire et fragile ; ni elle n’est absente ni elle n’est toujours dépourvue de justesse et de pénétration. Durand de Troarn donne de sages conseils de prudence et d’humilité pour la lecture des Pères, c. xxvi, col. 1417, et s’explique en ces termes remarquables sur saint Augustin, c. xxiv, col.l415 iDumscribendis libris operose insudat, minus se quibusdam in tncis explical, ac per hoc nonnullis minus eruditis, aique in sacris Scripturis apprime nequaquam elimatis, aut difficilis videtur aut, non rede intdledus, erroris seminarium fieri probatur. Cœterum, si aliter quid intellexisse tiac de re et ab integritate tanti mysterii alienum probaretur dixisse, quod absit, ex difflnito proferendum erat quod Apostolus ait : etiamsi angélus de cxlo annuntiaverit vobis prseter quod accepistis, analhema sit. Cf. encore Eusèbe Brunon, Epist. ad Berengarium magistrum, P. L., t. cxLvii, col. 1203-1204.

A propos de saint Augustin, Guitmond, De corporis et sanguinis Domini veritate in eucharistia, I. III, P. L., t. CXLIX, col. 1484-1488, rappelle l’enseignement du saint docteur sur la nécessité de s’incliner devant la croyance générale, devant celle qui est professée par l’Église catholique ; les bérengariens ne sont qu’une poignée, ils ne sont pas l’Église ; si ergo vobis, o berengariani, beatus Augustinus iia, ul solet, clarissimus est, judicium ejus sequimini… Beati Auguslini judicio, vos stolidi estis qui de corpore Christi quod in loto terrarum orbe creditur credere recusatis. D’autres que Guitmond font appel au grand principe d’autorité. Hugues de Lan grès, Tradatus de corpore et sanguine Christi contra Berengarium, P. L., t. cxlii, col. 1333-1334, écrit à Bérenger : nec præsumas singulariter sentire quod universitas non assentit. Ascelin lui dit, P. L., t. CL, col. 68 : davem scientiee volvens, ipse non introire vidcris, quoniam universali Ecdesise dissentis, e’quibus persuades quod sentis nimirum introeundi adilum claudis. Durand de Troarn, c. ii, col. 1378, s’écrie : Absit… ut… minus aliquid fateamur quam calholica per universum orbem prsedicol Ecclesia. Cf. Lanfranc, c. XXII, col. 440-441. Et Adelman adjure Bérenger de ne pas se séparer ab unitate sandse matris Ecdesiie et de ne pas déchirer la « p^îix catholique » . De euchnristiæ sacramento ad Berengarium epistola, P. L., t. cxliii, col. 1289-1290. Cf. E. Faivre, La question de l’autorité au moyen âge : Bérenger de Tours, Toulouse, 1890. Rarement, le sentire cum Ecclesia est mieux apparu comme la règle de la foi orthodoxe.

Parmi tous ces progrès de l’argument scripturaire ou patristique et parallèlement à la mise en lumière du sentire cum Ecclesia, une métaphysique surnaturelle de l’eucharistie se dessine. La renaissance carolingienne est riche de promesses : la philosophie aristotélicienne commence à être utilisée, on se préoccupe d’éclairer les données de l’Écriture et des Pères par les procédés de l’analyse philosophique, de l’analogie théologique, et la méthode scolastique proprement dite tend à s’établir à côté de la méthode positive pour la compléter. Bérenger, sans être le rationaliste que beaucoup ont vu en lui, par exemple, H. Reuter, Geschichte der religiôsen Aufklàrung im Mittelalter, t. I, p. 104-111 ; cf. Hauck, Realencyklopâdie, L.eipzig, 1897, t. II, p. 611, fait la part très grande — et trop grande — à la raison et témoigne à la dialectique une confiance excessive dans l’étude des dogmes. Les défenseurs de la doctrine catholique sont amenés à le suivre sur son terrain dans la mesure où la chose est légitime. L’hérésie bérengarienne est le jjolnt de départ d’une activité théologique féconde. Ce n’est pas encore la scolastique ; ce sont ses premières lueurs, faibles et hésitantes, mais annonçant le jour qui vient.