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IMMACULÉE CONCEPTION


nie, à tous les Starovières séparés de l’Église orthodoxe, publiée dans l’organe du saint-synode, les Nouvelles ecclésiœiliques, n° du 10 mars 1912, p. 399. Un théologien starovière, A. I. Morosov, répondit à l’aichevêque de Volhj’nie qu’il se méprenait sur la doctrine des latins, et que ceux-ci n’enseignaient pas la conception virginale de la mère de Dieu. Dans sa réplique, parue dans les Nouvelles ecclésiastiques du 14 juillet 1912, p. 1143-1150, Mgr Antoine, assez embarrassé pour se justifier, écrivait avec désinvolture : « Il est vrai que les catholiques n’enseignent pas la conception virginale de Marie, mais votre missionnaire a affirmé cela dans une conversation avec le P. Xénophon. »

Ces remarques suffisent pour faire apprécier à sa juste valeur l’opposition qu’a rencontrée la doctrine de l’immaculée conception dans l’Église gréco-russe dissidente, à partir du xvi<î siècle. Il n’entre pas dans le cadre de ce dictionnaire de faire l’histoire détaillée de cette opposition, qui n’a été vraiment sérieuse qu’après la définition de Pie IX, en 1854. Nous croyons cependant utile de donner un bref aperçu de l’attitude observée par les théologiens dissidents à l’égard de la doctrine catholique pendant la période moderne. Nous parlerons séparément des théologiens grecs et des théologiens russes. Cette division s’impose par le fait que l’évolution doctrinale sur cette question, comme sur bien d’autres, i/a pas suivi une marche parallèle dans l’Église grecque et dans l’Église russe.

1 » Théologiens grecs. — Peu florissante chez les byzimtins, la théologie dogmatique n’existe pour ainsi dire pas chez les grecs modernes. Des catéchismes, des sermonnaires, quelques maigres résumés de scolastique occidentale, des traités de polémique contre les catholiques et les protestants, voilà, à peu près, à quoi se réduisent ses productions. Comme nous l’avons dit plus haut, relativement à l’immaculée conception, les théologiens grecs se divisent en deux groupes : le groupe des adversaires et le groupe des partisans de la doctrine catholique.

Parlons d’abord des adversaires. Le premier que nous rencontrons, au xi’siècle, est Damascène le Studite († 1577), auteur d’un recueil de sermons qui a cours encore de nos jours dans les pays grecs et qui porte le titre de Trésor, i-h, c-xjyi :. Voir Dam.scène LE Studite, t. iv, col. 27-28. Dans un sermon sui l’Annonciation, Damascène déclare que Marie n’a pas été exempte du péché d’Adam, et que, seul, Jésus-Christ a été engendré sans péché. C’est au jour de l’annonciation que la Vierge fut délivrée du péché originel. L’orateur ne donne pas d’autre explication et se contente d’invoquer l’autoiité de saint Jean Damascène. <-)ï, 77.jooç A7. ; j.a7L/, v’; j, édit. d’Athènes, 1893, p. 5-G..u demeurant, il ne paraît pas avoir une notion bien nette du péché originel, puisqu’il le fait coexistei dans l’âme de Marie avec la grâce du Saint-Esprit. Dans une homélie sur la Présentation, ibid., p. 159, il dit positivement qu’au moment où la Vierge fut iirésentée au temple, à l’âge de trois ans, elle était le tabernacle de l’Esprit-Saint, '></ ; ’// toi i- ; (oj IIvîo Un autre théologien du xvie siècle, Jean Nathanaèl, reproduit, en lui donnant la tournure d’une affirmation catégorique, le passage du commentaire de r’Aî’.'i/ ; -j-.[-/ de Nicéphore Calliste, dont nous avons parlé plus haut, col. 910, dans un ouvrage en giec vulgaire, Intitulé : La divine liturgie avec des explications de différents docteurs, Venise, 1574, p. 81. Cf. E. Lcgrand, Bibliographie hellénique des xv et xri’aiicks, t. ii, p. 201-205.

Au xvir siècle, les adversaires de l’immaculée conception se multiidient, et ce sont presque tous des noms illustres : Métrophane Critopoulos, patriarche d’Alexandrie († 1639), Georges Coressios, Mélèce

Syrigos († 1664), Dosithée, patriarche de Jésusalem († 1707), Sévastos Kyménités († 1702). Métrophane Critopoulos, dans sa Conicssion de foi, c. xvii, ne craint pas de présenter comme doctrine officielle de l’Église grecque l’opinion d’après laquelle Marie a été purifiée du péché originel par le Saint-Esprit, au jour de l’annonciation. Pour Mélèce Syrigos, la preuve irréfutable que Marie a contracté le péché originel, c’est qu’elle est morte. Sermon sur l’Annonciation, contenu dans le cud. 254 du Métochion du Saint-Sépulcre à Constantinople, p. 1018-1019. Bien pauvre théologie, il faut l’avouer ! Dosithée combat l’immaculée conception au nom de l’Épître aux Romains. K. Delicanis, IIaTçia'>-/tLà ïyypasa, Constantinople, 1905, t. iii, p. 211. Quant à Sévastos Kyménités, il écrit tout un traité contre la doctrine catholique et énonce, à plusieurs reprises, des propositions contradictoires sans avoir l’air de s’en douter. Parmi les arguments qu’il fait valoir se trouvent les deux suivants : 1° si Dieu avait exempté sa mère de la faute originelle, il aurait manqué d’impartialité et fait acception de personnes ; 2° si la Vierge n’avait pas eu le péché originel, le genre humain n’aurait pu être délivré de ce péché. Pourquoi ? Parce que, selon un adage célèbre formulé par les Pères contre l’hérésie d’Apollinaire : ce qui n’a pas été pris par le Verbe n’a pu être guéri par lui, to yaçi à-po<7), T|--ov iOspârsuTov. Belle raison, qui conduirait notre grec, s’il était logique, à admettre que Jésus-Christ a dû prendre une nature humaine souillée par le péché originel I

Au xviiie siècle, deux théologiens, Jean de Lindos († 1796) et Nicodème l’Hat-’hiorite († 1809), présentent ceci de particulier que, tout en professant que Marie fut purifiée de la tache originelle, au jour de l’annonciation, ils enseignent qu’elle était remplie de la grâce divine bien avant cette date et dès le sein maternel. D’autres, comme Diamantis Rhysios, Éphrem de Jérusalem, Eugène Bulgaris et ses disciples, Théoiihile ^de Campanie, Athanase de Paros, Joasaph Cornilios, s’en tiennent simplement à la position prise par Métrophane Cristopoulos dans sa Confession. C’est aussi le cas de la plupart des théologiens du xixe siècle. Tout récemment. Nectaire Képhalas, dans un opuscule sur les sept sacrements, MeXiTa ; - ; o ; -ôjv 0£i’.)v |j.u3- : T|pt’».)v, Athènes, 1915, p. 28-29, en note, a osé émettre une opinion nouvelle. D’après lui, la Vierge, bien qu’ayant contracté le péché originel au premier instant de sa conception, fut sanctifiée dans le sein maternel. Or, dit-il, la sanctification in utero entraîne nécessairement la délivrance du péché d’origine. Il ne voit pas, dès lors, comment on peut retarder pour Marie cette délivrance jusqu’au jour de l’annonciation.

A côté des adversaires du privilège mariai, nous rencontrons aussi bon nombre de théologiens qui marchent dans la voie de l’antique tradition. Au xvie siècle, un prédicateur, le prêtre Alexis Rharlouros, dans un sermon sur l’Annonciation, déclare que la Vierge fut sanctifiée parle Saint-Esprit dès le sein de sa mère et pleine de grâce, ïI. LotXia ; Tr, ; a.ù-i( ;  ; jLT|-poç’0 lIv£i|jLa TO ay.ov tï, v r^-^ixii’/, -La ! r, / -r[p^ ; yapiTO, A.oa/ai, Venise, 1560, et il semble bien qu’il parle d’une sanctification in primo inslanli.

Au xvHe siècle, CjTille Lucar, patriarche d’Alexandrie, puis patriarche de Constantinople († 1638), enseigne expressément l’immaculée conception dans un sermon sur la Dormition, daté de 1612, et dans un autre sur la Nativité de la Vierge, de 1616. Dans le premier, passant en revue les merveilles que Dieu a faites en Marie, il écrit ; « La merveille de la sanctification : parce que, bien que d’autres personnages aient été sanctifiés avant leur naissance, aucun ne l’a été comme la Panaghia. Elle fut, en effet, sanctifiée d’une manière excellente, et cette sanctification fut