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DEUX ET DEUX FONT CINQ

pour battre le record des grands nageurs. Je fus néanmoins assez heureux pour flotter quelques instants sur une pâle épave. À la fin, engourdi par le froid, je fis comme mon bateau et comme mes petits camarades : je coulai. Mais… écoutez-moi bien, je n’avais pas perdu une goutte de mon sang-froid, et mon programme était tout tracé dans ma tête.

— Vous êtes vraiment un homme de sang-froid, vous !

— J’en avais énormément dans cette circonstance : la chose se passait fin décembre.

— Très drôle, sir !

— Du talon de ma botte, je détachai de la coque de mon brick un bout de fer qu’après avoir émietté dans mes mains d’athlète, j’avalai d’un coup. Doué, à cette époque, d’une vigueur peu commune, j’empoignai une des touries naufragées d’acide sulfurique et j’en avalai quelques gorgées.

— Tout ça, au fond de la mer ?

— Oui, monsieur, tout ça au fond de la mer ! On ne choisit pas toujours son laboratoire… Ce qui se passa, vous le devinez, n’est-ce pas ?

— Nous le devinons ; mais expliquez-le tout de même, pour ceux de nos lecteurs qui ne connaissent M. Berthelot que de nom.

— Vous avez raison !… Chaque fois qu’on met en contact du fer, de l’eau et un acide, il se dégage de l’hydrogène… Je n’eus qu’à clore hermétiquement mes orifices naturels, et en particulier ma bouche ;