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NOTES SUR LA CÔTE D’AZUR


Ce matin, je promenais au bon soleil, sur la promenade de la Croisette, ma carcasse endolorie, quand j’aperçus, venant à moi, une jeune fille hongroise fort jolie, gentiment intellectuelle et d’un flirt ravigoteur.

Je l’appelle Hieratica Pittoresco parce que son véritable nom ressemble un peu à ces syllabes et que, dans le commencement, je ne m’en souvenais jamais (de son nom).

Hieratica me tendit sa petite main finement gantée, comme dans les romans de Georges Ohnet. (Avez-vous remarqué, dans les romans de Georges Ohnet, que les jeunes femmes tendent toujours aux messieurs leur petite main finement gantée ?)

Puis elle me dit, avec un beau sourire clair comme le temps :

— Tiens, ça a l’air d’aller mieux, vous, ce matin, votre neurasthénie.

— Des êtres tels que moi, Hieratica, peuvent-ils jamais aller mieux ? Mettons moins pis et n’en parlons plus.

— Si, si, je m’y connais, moi ! Vous détenez le record de la désespérance pas tant que ces jours passés. Reçu un tendre mot de l’exclusive chérie, peut-être ?

— Pas un mot, Hieratica, pas un geste.

— Alors, quoi ?… J’ai pourtant vu, tout à l’heure,