marine dont chaque coup représente la modique somme de 1,800 fr. (dix-huit cents francs). Il faut que le peuple français soit un miché bougrement sérieux pour se payer de pareils coups.
Vous l’avouerai-je, mon cher Paul, ces dépenses me déchirent le cœur !
Pauvre France, j’aimerais tant la voir riche et victorieuse à la fois !
Et l’idée m’est venue d’utiliser la science moderne pour faire la guerre dans des conditions plus économiques.
Pourquoi employer la poudre sans fumée, qui coûte un prix fou, quand on a le microbe pour rien ?
Intelligent comme je vous sais, vous avez déjà compris.
On licencierait l’armée, on ferait des casinos dans les casernes, on vendrait les canons à la ferraille. On liquiderait, quoi !
Au lieu de tout cet attirail coûteux et tumultueux, on installerait discrètement de petits laboratoires où l’on cultiverait les microbes les plus virulents, les plus pathogènes, dans des milieux appropriés.
À nous les bacilles virgule, à nous les microbes point d’exclamation, sans oublier les spirilles de la fièvre récurrente !
Et allez donc !… Le jour où l’Allemagne nous embêtera, au lieu de lui déclarer la guerre, on lui déclarera le choléra, ou la variole, ou toutes ces maladies à la fois.
Le ministère de la guerre sera remplacé, bien entendu, par le ministère des maladies infectieuses.
Comme ce sera simple ! Des gens sûrs se répandront sur tous les points de la nation abhorrée et distribueront, aux meilleurs endroits, le contenu de leurs tubes.
Ce procédé, mon cher Paul, a l’avantage de s’adresser à toutes les classes de la société, à tous les âges, à tous les sexes.