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Un honnête homme dans toute la force du mot


Je vais raconter les faits simplement ; la moralité s’en dégagera d’elle-même.

C’était pas plus tard qu’hier (je ne suis pas, moi, comme mon vieil ami Odon G. de M. dont les plus récentes anecdotes remontent à la fin du treizième siècle).

C’était pas plus tard qu’hier.

J’avais passé toute la journée au polygone de Fontainebleau, où j’assistais aux expériences du nouveau canon de siège en osier, beaucoup plus léger que celui employé jusqu’à présent en bronze ou en acier et tout aussi profitable, comme dirait mon vieux camarade le général Poilu de Sainte-Bellone.

(Ajoutons incidemment que j’ai rencontré dans les rues de Fontainebleau mon jeune ami Max Lebaudy, très gentil en tringlot et prenant gaiement son parti de sa nouvelle position. Il voulait me retenir à dîner, mais impossible, préalablement engagé que j’étais au mess de MM. les canonniers de l’École. Ce sera pour une autre fois.)

Après avoir absorbé, en gaie compagnie, quelques verres de l’excellente bière des barons de Tucher, j’envahis le train qui, partant à 10 h. 5 de Fontainebleau, devait me déposer à Paris à 11 h. 24.

(Je précise, pour faire plaisir à M. Dopffer.)

Dans le compartiment où m’amena le destin se trouvaient, déjà installés, un monsieur et un petit garçon.

Le monsieur n’avait rien d’extraordinaire, le petit garçon non plus (un tic de famille, probablement).

Malgré ma haute situation dans la presse quotidienne, je consentis tout de même à engager la conversation avec ces êtres dénués d’intérêt.