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CHAPITRE XXXIII.


Après avoir en France soulagé le peuple et l’avoir rendu maître des terres, les Français, au lieu d’organiser la tête de l’État, ont continué de s’attendrir sur les masses, les poussant à la révolte et exerçant la pitié sur des douleurs imaginaires : la jeunesse des boulevards se passionnait pour les ouvriers, les pauvres, sans s’informer du sort des ouvriers et des pauvres ; on avait plaint le peuple, le troupeau plaignit le peuple. Il eût été facile pourtant de trouver des faits, et, en rejetant la statistique qui circule, d’aller aux documens officiels.

Loin de nous l’idée que le peuple ne demande plus de soins ni qu’il devra jamais s’en passer. Quel homme peut se croire dégagé envers son semblable, tant que son semblable n’est pas si bien que lui ? Mais pour satisfaire les besoins du peuple il faut les connaître ; et si à un homme qui demande de l’instruction vous portez du pain, vous vous trompez grossièrement. Or, chacun sait que la France, sur cinquante millions d’hectares, dont quarante sont en culture, contient trente-deux millions d’habitans, et que la propriété est partagée, d’après les évaluations les plus basses, entre cinq millions d’hommes : en supposant quatre personnes par famille (ce qui est peu), nous aurons vingt millions de personnes composant les familles propriétaires. Que dirait Tiberius Graechus, lui qui s’écriait devant le peuple :

« Les bêtes sauvages des montagnes et des forêts de l’Italie ont leurs tanières pour s’y retirer, mais ces braves Romains ne possèdent que l’air et la lumière, qu’on ne peut leur ravir. Les généraux, dans les batailles, les exhortent à combattre pour leurs tombeaux et leurs dieux domestiques, et nul d’entre