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verrons plus ou moins fortes et royales ; ceux qui ne sont pas au pouvoir vivent retirés avec le petit nombre d’amis qu’ils ont choisis, sans entrer dans le train frivole du monde : ainsi MM. de Chateaubriand, Béranger, Royer-Collard, Ampère, Lamartine, La Mennais, Victor Hugo, et quelques autres, ont naturellement le caractère d’une aristocratie hautaine, isolée et disciplinée : « N’y a-t-il en ce monde que la succession du sang et les traditions de la famille ? Les traditions de pensée, de système et d’école politique sont-elles donc moins fécondes, et ont-elles jamais défailli là où les talens germent libres et s’élancent solitaires de la plus profonde obscurité aux premières dignités de la patrie ? Nos législateurs de la Constituante, nos saints patriotes de la Gironde, cette race de bourgeois élevés dans la médiocrité et la retraite, sans appui que leur méditation, où donc avaient-ils pris leurs modèles, si ce n’est dans l’étude, au fond de leur ame, sous l’inspiration de Dieu et de la patrie ? Les nobles traditions ne périront pas parce qu’un privilège repoussé par les siècles sera tombé : la famille des grands citoyens est partout[1]. »

L’ancienne aristocratie fut-elle supérieure aux écoles antiques, aux premiers chrétiens, et surtout à la secte stoïcienne dont Montesquieu a dit qu’elle seule faisait les grands empereurs ? Les familles des Scipion, des Appins, des Julius, égalèrent-elles ces écoles, et daignerons-nous leur comparer les modernes familles des Condé, Montmorenci, Russel, Visconti ? Quelle est l’ame noble à qui une promenade dans les champs n’a pas donné plus que n’eût donné une grande naissance ? L’aristocratie plébéïenne de France n’ayant pas dû beaucoup, comme

  1. M. Dubois