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de grand et de poétique : le génie en présence du peuple qu’il charme et subjugue. Du sein de nos puissantes monarchies, nous nous sommes mal imaginé ces petites républiques grecques, ces villes étroites, cette population peu nombreuse, mais douée du ciel, ces lieux champêtres, ce mouvement de la place publique, ces affaires resserrées que de nobles mains et des esprits lumineux ont rendues fameuses ; nous avons vu la Grèce plus riche, plus étendue et moins poétique ; nos vastes territoires, nos villes, notre peuple immense, nous feraient d’abord trouver mesquins les Grecs, leurs villes, leurs armées, et jusqu’aux formes charmantes de leur gracieuse contrée, si l’antiquité pouvait apparaître un moment à nos yeux. À peine Solon donne sa loi, que Pisistrate la menace ; dès lors un parti usurpateur s’établit dans l’état, et remarquons que ce parti fut celui de la démocratie, car ceux qui voulurent dominer le peuple le flattèrent. Thémistocle, sorti du peuple et démocrate, trouva pour adversaire Aristide, du parti de l’aristocratie, qui voulait resserrer le gouvernement. Périclès, descendant de Pisistrate, effrayé de son origine et de la ressemblance de son visage avec celui de ce tyran, embrassa les intérêts de la démocratie contre Cimon, fils de Miltiade, aristocrate qui s’opposait à la grandeur de Périclès : toujours à Athènes ce nom de démocratie revêtit les passions de l’ambition. Mais des hommes comme Thémistocle, et d’autres, n’auraient pas eu le pouvoir à Rome et valurent mieux que Marius, qui, parvenu par tant d’efforts et à travers les dédains des nobles, ensanglanta sa route. Il est vrai que tandis qu’Aristide venait dans les assemblées avec un habit usé et tremblant de froid, Thémistocle volait le trésor ; il fit les fautes reprochées éternellement aux plébéïens, et que l’aristocratie romaine, dans sa décadence, commit avec audace.