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bres, de même les plébéïens anglais qui arrivent à Paris doivent être avertis que la richesse et la naissance, la matière et les préjugés, sont vaincus en France pour la gloire de ce monde moral et invisible dont le triomphe se prépare.

Les états ne grandissent pas par les mêmes moyens qui les ont fondés : le passé donne le secret des forces actuelles : l’Angleterre n’a pas commencé par le commerce ; la France, par l’égalité ; l’Italie, par vouloir s’unir, car si le petit royaume de France, si l’Aquitaine, la Bretagne, eussent songé à l’égalité, à la république, au renversement de la royauté, nous n’aurions pas ce beau royaume de France qui s’étend des Pyrénées à la Meuse, de la Savoie à la mer du Nord ; nos vignes de la Bourgogne et du Bordelais, nos soiries, nos arts, n’eussent pas fait notre fortune ; notre peuple n’eut pas eu l’idée qu’il garde de la grandeur publique ni une influence européenne.

Il s’est trouvé un homme du peuple avec du génie. Je l’appellerai le père de la société moderne. Domestique et mendiant, cet homme a établi la force morale au dessus de la force matérielle ; il a renversé de loin l’ancienne société, l’aristocratie factice, et montré que le temps est venu d’en laisser développer une naturelle. Son ame était la plus sensible et la plus puissante qui eût encore existé : ses émotions, ses pleurs, ses ravissemens, ses douleurs, rétablirent la nature dans son premier pouvoir et marquèrent un changement préparé par les siècles. Il prit sa servante, l’épousa, vécut publiquement avec elle ; il ne connut dans ses affections ni la crainte ni le rang ; il fut vrai, il fut peuple.

Un autre homme, né dans la noblesse, adora celui-ci, souffrit comme lui, pensant à la justice, à la liberté, à cette haute vertu qui ne préserve pas toujours les hommes des fautes inférieures. L’un avait parlé dans ses livres, l’autre parla à la tribune et fit succéder