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PREMIÈRE PÉRIODE

AGNÈS DE NAVARRE CHAMPAGNE

(Dame de FOIX, née vers 1330.)


Fille de Thibaut VII, comte de Champagne, de Navarre par sa grand’mère, elle avait hérité de son aïeul, Thibaut VI, d’une nature de poète et d’artiste ; musicienne, rieuse, expansive, c’est la plus ravissante personnalité de l’époque qu’Agnès de Champagne. Son imagination ardente, son goût pour les lettres dans ce qu’elles ont de plus exquis, l’entraînèrent dans une liaison romanesque avec Guillaume de Machau, chansonnier célèbre du XIVe siècle, secrétaire de Jean de Luxembourg, contrefait, goutteux, déjà âgé. Elle lui fit savoir mystérieusement qu’une jeune princesse admirait ses vers ; il n’en fallut pas davantage pour exciter l’imagination de Machau : une correspondance littéraire et sentimentale s’établit ; Agnès devint l’élève et l’émule du spirituel et tendre poète. De charmantes lettres pleines d’enjouement et de sensibilité, de nombreux rondeaux, ballades et chansons[1], dont Machau fit la musique et qu’Agnès chantait à ravir, furent le résultat de ce bel enthousiasme, qui, malgré les protestations affectueuses de la jeune élève, resta certainement

  1. Édités dans la collection des Poètes champenois, 1856, Reims, par M. Léon Tarbé.