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ANTHOLOGIE FÉMININE

Voici ce que je vis un beau jour de printemps :
Le soleil radieux illuminait la plaine ;
Des oiseaux qui chantaient, heureux de ce beau temps,
Et moi-même attendrie et voulant prendre haleine.

Je m’assis un instant sur le bord du sentier.
Un arbre séculaire étendait son feuillage,
Un oiseau gazouillait tout près d’un églantier,
Et j’entendis soudain du sein de cet ombrage

Un doux son retentir… Je cherchais çà et là…
C’était comme un soupir envoyé par la brise,
« Ma sœur, disait la voix, oh ! que je suis éprise
« De ce charmant oiseau qui demeure par-là ! »

Quelqu’un lui répondit avec un ton plus fort :
« Enfant, vous aimez tout, le soleil dans la plaine,
« L’oiseau, le papillon, tout ceci vous entraine !
« Aimer tout, selon moi, c’est avoir un grand tort !

« Car vous avez ici peu de temps pour fleurir.
« Le soleil d’aujourd’hui qui vous a fait éclore
« Demain vous mûrira ! Peut-être un jour encore
« Et vous serez ici, las ! bien près de mourir !…

« Croyez-moi, cachez-vous et fermez votre cœur,
« De crainte de l’user et de vivre trop vite,
« Vivez sans rien aimer, tâchez qu’on vous évite
« En montrant vos épines, alors on aura peur. »
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