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ANTHOLOGIE FÉMININE

voie au groupe choisi des membres de notre armée et de notre marine qui entourent le chef de l’État à l’Élysée et y ont entretenu les sympathies franco-russes, le tribut d’une reconnaissance qui ne peut être dédaignée, car elle est celle de la première des russophiles qui, le jour de la capitulation de Paris, après avoir appris que la grande-duchesse héritière de Russie, aujourd’hui l’impératrice, avait refusé de boire à la victoire de Sedan, écrivait dans des notes journalières publiées sous le titre de Journal d’une Parisienne, siège de Paris : « Tournons-nous vers la Russie, c’est d’elle que nous viendra le relèvement. »

Et il est venu par la Russie, ce relèvement, après vingt années, durant lesquelles ni chagrins, ni déboires, ni calomnies, ni sacrifices, ni incompréhension de mes actes, ni soupçons, ni ridicules, ne m’ont été épargnés. Je me rappelle à cette heure, entre tant d’autres, l’un des mots les plus cruels et les plus récents qui me fut dit à l’Hippodrome, le jour de la première représentation de Skobeleff, par un grand journaliste d’un grand journal parisien, et qui donne bien l’idée du ton qu’on n’avait cessé de prendre avec moi : « Avant deux ans, me fut-il dit, vous serez traînée sur une claie sur les boulevards de Paris, car c’est vous qui avez le plus contribué à donner à la France le goût du cosaque. » Gambetta ne m’avait-il pas écrit, en 1876, un an avant le congrès de Berlin : « Il faut être effronté pour rêver l’alliance russe. » L’injure, on le voit, allait crescendo, comme allait, il est vrai, le progrès de l’idée russe en France. Et, puisque j’ai répété deux mots