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ANTHOLOGIE FÉMININE

dans une terre jaune et pierreuse, craquelée par la sécheresse, des vergers d’oliviers rabougris dont les grappes d’un blanc grisâtre atténuent encore le feuillage pâle, de vigoureux amandiers fourchus chargés de leurs coques vertes, de gros figuiers noirs tout tortus, des câpriers à mignonnes fleurs roses. Des bouquets de pins étiques et de maigres acacias, quelques vieux mûriers gibbeux, décharnés et chauves, signalent un petit mas, abrité des coups de mistral par un rideau de cyprès chétifs. Le maïstral, le « magistral », c’est-à-dire le vent par excellence, celui dont on disait naguère :

   « Parlement, Mistral et Durance
  Sont les trois fléaux de Provence. »

Auprès de ces humbles métairies au porche accosté d’une treille, des murs bas en pierres sèches habillés de pourpiers à fleurs rouges et orangées, des buissons épineux de cactus et de lentisques, ou simplement des haies de joncs et de roseaux desséchés, enclosent des jardinets faits avec de l’humus rapporté sur un coin de terrain épierré, qu’arrose parcimonieusement un imperceptible filet d’eau. Ce n’est que l’humidité qui manque au généreux sol provençal pour donner une végétation vigoureuse. Dès qu’il a si peu que ce soit de quoi étancher sa soif, il verdoie avec abondance, et ce sont les oasis de ce désert rocailleux, ces petits potagers où la sauge, la verveine et le romarin embaument les planches d’oignons et d’ail, d’aubergines et de « pommes d’amour », à l’ombre légère de grêles micocouliers.