Page:Amiel - Charles le Téméraire, 1876.djvu/38

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Pour nous, silencieux, l’un à l’autre vissés,
Raidissant sous le fer nos muscles ramassés,
Nous attendons leur coup comme on attend l’orage.
Ils frappent. Nous sentons le poids de leur courage.
Nous avons oublié l’aiguillon de la faim
Et huit heures d’élan, de sueur, de fatigue.
L’ouragan noir redouble ! il se déchaîne en vain,
        Il n’entame point notre digue.


Ainsi la main du maître a renoué le jeu…
Tout-à-coup, vers l’ouest où paraît un coin bleu,
La Taure d’Unterwald, trompe de Charlemagne,
Au fier Taureau d’Uri répond dans la montagne,
Meuglement formidable et si prodigieux
        Qu’en suspens, les pieds dans la fange,
L’ennemi stupéfait crut ouïr, dans les cieux,
        Sonner le clairon de l’archange.