Page:Anatole France - Balthasar.djvu/132

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De tels changements sont dans la nature des choses. Les montagnes s’affaissent dans le cours des âges ; le fond de la mer se soulève au contraire et porte jusqu’à la région des nuées et des glaces les coquillages et les madrépores.

Rien ne dure. La figure des terres et des mers change sans cesse. Seul le souvenir des âmes et des formes traverse les âges et nous rend présent ce qui n’était plus depuis longtemps.

En vous parlant des Clarides, c’est vers un passé très ancien que je veux vous ramener. Je commence :

La comtesse de Blanchelande, ayant mis sur ses cheveux d’or un chaperon noir brodé de perles…

Mais, avant d’aller plus avant, je supplie les personnes graves de ne point me lire. Ceci n’est pas écrit pour elles. Ceci n’est point écrit pour les âmes raisonnables qui méprisent les bagatelles et veulent qu’on les instruise toujours. Je n’ose offrir cette histoire qu’aux gens qui veulent bien qu’on les amuse et dont l’esprit est jeune et joue parfois. Ceux à qui suffisent des amusements pleins d’innocence me liront seuls jusqu’au bout. Je les prie,