Page:Anatole France - Balthasar.djvu/18

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retenir. Arrivé près de la chambre à coucher, il vit le roi de Comagène qui en sortait, tout couvert d’or et brillant comme un soleil.

Balkis, étendue sur un lit de pourpre, souriait, les yeux clos.

— Ma Balkis, ma Balkis ! cria Balthasar.

Mais elle ne détournait pas la tête et elle semblait prolonger un songe.

Balthasar s’approcha et lui prit une main qu’elle retira brusquement.

— Que me voulez-vous ? lui dit-elle.

— Vous le demandez ! répondit le roi noir en fondant en larmes.

Elle tourna vers lui des yeux tranquilles et durs.

Il comprit qu’elle avait tout oublié et il lui rappela la nuit du torrent. Mais elle :

— Je ne sais, en vérité, ce que vous voulez dire, seigneur. Le vin de palmier ne vous vaut rien. Il faut que vous ayez rêvé.

— Quoi ! s’écria le malheureux prince en se tordant les bras, tes baisers et le couteau dont j’ai gardé la marque, ce sont des rêves !…

Elle se leva ; les pierreries de sa robe firent le bruit de la grêle et lancèrent des éclairs.

— Seigneur, dit-elle, voici l’heure où s’as -