Page:Anatole France - Balthasar.djvu/57

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surpris de lire dans les journaux que la belle miss Morgan y avait fait sensation dans le costume de Néférou-Ra.

Je n’entendis plus parler d’elle tout le reste de l’année 1886. Mais, le premier jour du nouvel an, comme j’écrivais dans mon cabinet, un valet m’apporta une lettre et un panier.

— De la part de miss Morgan, me dit-il.

Et il se retira.

Le panier étant posé sur ma table, il en sortit un miaulement. Je l’ouvris ; un petit chat gris s’en échappa.

Ce n’était pas un angora. C’était un chat d’une espèce orientale plus svelte que les nôtres, et fort ressemblant, autant que j’en pus juger, à ceux de ses congénères dont on trouve en si grand nombre, dans les hypogées de Thèbes, les momies enveloppées de bandelettes grossières. Il se secoua, regarda autour de lui, fit le gros dos, bâilla, puis s’alla frotter en ronronnant contre la déesse Pacht, qui élevait sur ma table sa taille pure et son fin museau. Bien que de couleur sombre et de pelage ras, il était gracieux. Il semblait intelligent et se montrait aussi peu sauvage que possible. Je ne pouvais concevoir les raisons d’un si bizarre