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L’AFFAIRE CRAINQUEBILLE

pavé de la ville, et de voir sur sa tête le ciel tout en eau et sale comme le ruisseau, le bon ciel de sa ville.

Il s’arrêtait à tous les coins de rue pour boire un verre ; puis, libre et joyeux, ayant craché dans ses mains pour en lubrifier la paume calleuse, il empoignait les brancards et poussait la charrette, tandis que, devant lui, les moineaux, comme lui matineux et pauvres, qui cherchaient leur vie sur la chaussée, s’envolaient en gerbe avec son cri familier :

Des choux, des navets, des carottes ! Une vieille ménagère, qui s’était approchée, lui disait, en tâtant des céleris :

— Qu’est-ce qui vous est donc arrivé, père Crainquebille ? Il y a bien trois semaines qu’on ne vous a pas

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