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lui fit M. de Terremondre. Son cerveau, sain et durci, conservé comme dans la myrrhe, ne recevait plus aucune empreinte nouvelle, tandis que les idées et les passions anciennes y demeuraient profondément fixées.

MM. de Terremondre, Mazure et Bergeret, debout l’entouraient. Ils ignoraient son histoire, perdue dans un passé immémorial. Ils savaient seulement qu’il avait été le disciple, l’ami, le compagnon de Lacordaire et de Montalembert, qu’il avait résisté à l’Empire dans les limites exactes de son droit et de sa fonction, qu’il avait essuyé jadis les affronts de Louis Veuillot, et que, tous les dimanches, il allait à la messe, un gros livre sous le bras. Ils le voyaient, comme toute la ville, accompagné de son antique probité et de la gloire d’avoir soutenu durant sa vie entière la cause de la liberté. Mais aucun d’entre eux n’aurait pu dire de quelle façon il était libéral, car aucun n’avait lu cette phrase d’une brochure publiée par M. Cassignol en