Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/159

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui leur plaisaient encore mieux que des grains d’orge et d’avoine. Un geai, sorti du bois pour la première fois, ploya sur un cerisier dépouillé du jardin ses ailes de saphir. Devant le soupirail, un gros rat noir, tout ruisselant de l’eau grasse des égouts, planté sur son derrière, levait d’étonnement ses bras courts et ses doigts déliés. Un mulot, habitant du verger, se tenait près de lui. Descendu de sa gouttière, le matou domestique, qui gardait de ses aïeux sauvages le pelage gris, la queue annelée, les reins puissants, le courage et la fierté, poussa de son museau la porte entre-bâillée, s’approcha à pas muets du flûtiste, et, gravement assis, dressa ses oreilles déchirées dans des combats nocturnes. La chatte blanche de l’épicier le suivit, flaira l’air sonore, puis, le dos en arc, fermant ses yeux bleus, écouta ravie. Les souris, accourues de dessous le plancher, les entouraient en foule, et, sans crainte de la dent ni de la griffe, immobiles, joignaient voluptueusement sur leur poitrine leurs mains roses. Les araignées, loin de leurs toiles, les pattes frémissantes, assemblaient au plafond leur troupe charmée. Un petit lézard gris, s’étant coulé sur le seuil,