Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/340

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naisons chimiques et pourraient se formuler de la même manière. Je pense qu’on parviendrait à vous inculquer ces vérités ; mais ce serait long et difficile, et peut-être ne vous apporteraient-elles pas la sérénité qui vous fuit. Il convient donc que je quitte la place et…

— Restez, fit Maurice.

Maurice avait un sens très net des obligations sociales. Il mettait, quand il y songeait, l’honneur au-dessus de tout. Or, dans ce moment, il se représenta avec une force extrême que l’outrage qu’il avait subi ne se pouvait laver que dans le sang. Cette idée traditionnelle imprima aussitôt à son attitude et à son langage une noblesse inattendue :

— C’est moi, monsieur, dit-il, qui vais quitter cet appartement pour n’y plus revenir. Vous, restez-y puisque vous êtes proscrit. Vous y recevrez mes témoins.

L’ange sourit.

— Je les recevrai pour vous faire plaisir ; mais songez, mon cher Maurice, que je suis invulnérable. Les esprits célestes, même quand ils sont matérialisés, ne sauraient être atteints par la pointe d’une épée ou la balle d’un pis-