Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/259

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ainsi que mesdames Giray et Delarche et leurs filles, fort jolies toutes deux, mademoiselle Guerrier, élève du Conservatoire, le docteur Renaudin, à la fois joyeux et sinistre, madame Gobelin, vieille dame miniaturiste, d’une grande distinction, élève de madame de Mirbel, et sa fille Philippine, maigre, dégingandée, les cheveux fades, les yeux petits, le nez long, sinueux avec un bout détaché ovale ou plutôt ovoïde, la bouche grande, un air de bonté, pas de teint, la taille plate, les genoux perçants. Ses bras n’étaient pas beaux, mais, par compensation, ils étaient démesurément longs et elle les portait démesurément nus, on ne sait pourquoi. En tout cas, ce ne semblait pas être coquetterie de sa part, car elle disait que la nature, par maladresse ou distraction, lui avait fait le gras du bras plus mince que le poignet ; bonne personne, rieuse, mélancolique, moqueuse et tendre, ingénieuse et si animée, si diverse, si changeante qu’elle formait à elle seule tout un chœur de longues jeunes filles, une ronde folle de demoiselles Gobelin, les unes très laides, les autres presque jolies, toutes sympathiques et divertissantes au possible. Mademoiselle Gobelin vivait et aidait sa