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XXVI

LA DOULEUR DE PHILIPPINE GOBELIN

Le soleil de thermidor répandait ses nappes de flamme sur les quais, la rivière et les jardins. J’entrai au Louvre avec une familiarité respectueuse. Une fraîcheur humide baignait les salles désertes de la sculpture antique.

Devant ces restes d’un art sans égal, auprès duquel tout est misère et difformité, je fus saisi d’enthousiasme et de désespoir. Abîmé sur une banquette devant l’Arès Ludovisi, j’éprouvais une ardeur de vivre et de mourir, un mal délicieux, une tristesse infinie, une ivresse d’horreur et de beauté ; je sentais, en même temps, un désir insensé de tout voir, de tout savoir, de tout connaître, de tout devenir et en même