Page:Anatole France - La Vie en fleur.djvu/327

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sa puissance et son bien-être. Regardons les plus anciens peuples qui aient laissé des monuments de leur génie et comparons-les à nous. Bâtissons-nous mieux que les Égyptiens ? En quoi sommes-nous supérieurs aux Grecs ? Je ne tais point leurs vices et leurs défauts. Ils furent souvent injustes et cruels. Ils s’épuisèrent dans des guerres fratricides. Mais nous ?… Nos philosophes sont-ils plus sages que ne furent les leurs et voit-on en France ou en Allemagne un penseur plus profond qu’Héraclite d’Éphèse ? Faisons-nous de plus belles statues et des temples plus sereins qu’ils n’en firent ? Qui oserait prétendre qu’il a paru dans les temps modernes un poème plus beau que l’Iliade ? Nous sommes avides de spectacles : les nôtres égalent-ils en beauté une trilogie de Sophocle représentée sur le théâtre d’Athènes ? Parlerons-nous des idées morales ? Il faut remonter aux mystères d’Éleusis pour rencontrer les plus hautes conceptions que notre race ait eues de la mort. Venons-en à l’organisation et à la police des peuples. Un puissant effort fut tenté à cet égard. Ce fut quand Auguste ferma les portes de Janus et éleva dans Rome l’autel de la paix, et lorsque l’immense majesté