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LA VIE LITTÉRAIRE

toue fournit, entre autres variantes, la dernière strophe ainsi qu’il suit :

Consors ut beatitatis
Vivam cum justificatis
Inaevum aeternitatis.

Je crois qu’il faut la préférer, bien qu’elle n’offre point de césure après la quatrième syllabe du vers.

M. de Gourmont a essayé du Dies irae une version rythmique, avec assonances. Je ne crois pas que cet essai soit tout à fait heureux. Mais La Fontaine et aussi mon vieux maître Antony Deschamps firent chacun de cette prose une traduction bien plus mal heureuse encore. J’aime, au contraire, le Stabat tel que M. de Gourmont l’a traduit par la même méthode et où il se trouve des strophes bien venues :

La Mère était là, tout en pleurs,
Au pied de la croix des douleurs,
Quand son fils agonisa :
Son âme, hélas ! tant gémissante,
Tant contristée et tant dolente,
Un glaive la transperça.

On se rappelle le beau vers de Victor Hugo :

Elle était là debout sous le gibet, la mère !

Ozanam et M. de Gourmont attribuent le Stabat à Jacopone de Todi ; mais, en vérité, on ne sait pas au juste quel est l’auteur de ce Stabat de la croix ni du Stabat de la crèche :

Stabat Mater speciosa
Juxta fœnum, gaudiosa,
Dum jacebat Parvulus.

La gracieuse Mère se tenait joyeuse près du foin où le Petit était couché.