Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/142

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Il ne lui paraissait pas que ce qu’elle venait de faire fût grave en soi-même. D’abord, si elle ne s’était pas encore trouvée dans une semblable situation avec M. Roux, elle s’y était trouvée avec d’autres, en très petit nombre, il est vrai. Et puis tel acte qui, dans l’opinion, était monstrueux, apparaît à l’usage dans toute sa médiocrité plastique et son innocence naturelle. Devant la réalité le préjugé tombe. Madame Bergeret n’était pas une femme emportée hors de sa destinée domestique et bourgeoise par des forces invincibles cachées dans le secret de son être. Avec quelque tempérament, elle était raisonnable et soucieuse de sa réputation. Elle ne cherchait pas les occasions. À trente-huit ans, elle n’avait encore trompé M. Bergeret que trois fois. Mais c’était assez pour qu’elle ne fût pas tentée de s’exagérer sa faute. Elle y était d’autant moins disposée que cette troisième rencontre répétait essen-