Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/160

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conséquent édifiante, propre à répandre une paix sereine, une douceur céleste dans son âme. Et il rendit grâce à ces conteurs qui, de l’antique Milet, où fut dit le conte du Cuvier, jusqu’à la Bourgogne salée, à la douce Touraine, à la grasse Normandie, ont enseigné à l’homme le rire gracieux et disposé les cœurs irrités à l’indulgente gaieté.

« Ces conteurs, pensa-t-il, qui font froncer les sourcils des moralistes austères, sont eux-mêmes des moralistes excellents, qu’il faut louer et aimer pour avoir insinué gentiment les solutions les plus simples, les plus naturelles, les plus humaines, à des difficultés domestiques que l’orgueil et la haine, allumés au cœur fier de l’homme, veulent trancher par le meurtre et le carnage. Ô conteurs milésiens, ô subtil Pétrone ! ô mon Noël du Fail, s’écria-t-il, ô précurseurs de Jean de La Fontaine ! quel apôtre fut plus sage et meilleur que vous, qu’on appelle