Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/312

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il demanda une servante au buraliste, et sans doute il la voulait pourvue de qualités rares, car, après dix minutes d’entretien, il sortit découragé. Mais, en traversant de nouveau la salle commune, il avisa, dans un coin sombre, une créature qu’il n’avait pas vue la première fois. C’était une longue forme étroite, sans âge ni sexe, surmontée d’une tête osseuse et chauve, avec un front posé comme une sphère énorme sur un nez court tout en narines. La bouche ouverte laissait voir nues des dents de cheval et sous la lèvre pendante il n’y avait point de menton. Elle demeurait dans son coin, immobile et sans regards, sachant peut-être qu’elle ne trouverait pas à se louer de si tôt et qu’on prendrait les autres de préférence à elle, satisfaite pourtant d’elle-même et tranquille. Elle était vêtue comme les femmes du bas pays où règnent les fièvres. Et il y avait des brins de paille sur sa capeline tricotée.