Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/93

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— Allons ! dit M. Bergeret en soupirant, je reconnais le tort de madame de Gromance. Elle est née cent cinquante ans trop tard. Dans la société du XVIIIe siècle elle n’aurait pas encouru le blâme d’un homme d’esprit.

M. Mazure, flatté, se radoucit. Il n’était pas un puritain farouche. Mais il respectait le mariage civil auquel les législateurs de la Révolution avaient communiqué une dignité nouvelle. Il ne niait pas pour cela les droits du cœur et des sens. Il admettait les femmes légères en même temps que les matrones.

— À propos, ajouta-t-il, comment va madame Bergeret ?

Le vent du nord soufflait sur la place Saint-Exupère et M. Bergeret voyait le nez de M. Mazure rougir sous le bord rabattu du chapeau de paille. Lui-même avait froid aux pieds, aux genoux, et il pensait à madame de Gromance pour se remettre un peu de chaleur et de joie dans les veines.