Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/142

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rôtisseurs, et qu’ils tiennent leur magistrature du roi et non des marchands, notamment de la corporation des rôtisseurs parisiens dont je suis porte-bannière. S’ils étaient de mon choix, ils aboliraient la dîme et la gabelle et nous serions tous heureux. À moins que le monde ne marche à reculons comme les écrevisses, un jour viendra où les échevins seront élus par les marchands.

— N’en doutez point, dit M. l’abbé Coignard, les échevins seront élus un jour par les patrons et par les apprentis.

— Prenez garde à ce que vous dites là, monsieur l’abbé, répliqua mon père, inquiet et fronçant les sourcils. Quand les apprentis se mêleront de nommer les échevins, tout sera perdu. Du temps que j’étais apprenti, je ne songeais qu’à mettre à mal le bien et la femme de mon patron. Mais depuis que j’ai une boutique et une femme, j’entends les intérêts publics, qui sont liés aux miens.

Lesturgeon, notre hôte, apporta un pot