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LES DIEUX ONT SOIF

qui fonctionne dans la salle voisine, le citoyen Dumas, a été arrêté sur son siège, mais que l’audience continue. On entend battre la générale et sonner le tocsin.

Évariste, à son banc, reçoit de la Commune l’ordre de se rendre à l’Hôtel de Ville pour siéger au conseil général. Au son des cloches et des tambours, il rend son verdict avec ses collègues et court chez lui embrasser sa mère et prendre son écharpe. La place de Thionville est déserte. La section n’ose se prononcer ni pour ni contre la Convention. On rase les murs, on se coule dans les allées, on rentre chez soi. À l’appel du tocsin et de la générale répondent les bruits des volets qui se rabattent et des serrures qui se ferment. Le citoyen Dupont aîné s’est caché dans sa boutique ; le portier Remacle se barricade dans sa loge. La petite Joséphine retient craintivement Mouton dans ses bras. La citoyenne veuve Gamelin gémit de la cherté des vivres, cause de tout le mal. Au pied de l’escalier, Évariste rencontre Élodie essoufflée, ses mèches noires collées sur son cou moite.

— Je t’ai cherché au Tribunal. Tu venais de partir.

Où vas-tu ?

— À l’Hôtel de Ville.

— N’y va pas ! Tu te perdrais : Hanriot est