Page:Anatole France - M. Bergeret à Paris.djvu/161

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» Quoi qu’il en soit, une nuit, une des dernières de cette grande semaine, tandis que la manœuvre attendue s’exécutait de point en point, alors que la contre-manifestation se trouvait prise en tête et en queue par les agents et en flanc par nous-mêmes, je vis le citoyen Bissolo se détacher du front menacé des élyséens et, par grandes enjambées, avec un furieux tortillement de son petit corps, gagner l’angle de la rue Drouot où je me tenais avec une douzaine de camelots qui criaient sous mes ordres : « Panama ! démission ! » Un petit coin bien tranquille ! Je battais la mesure et mes hommes détachaient les syllabes « Pa-na-ma ». C’était vraiment fait avec goût. Bissolo se blottit entre mes jambes. Il me craignait moins que les flics : il n’avait pas tort. Depuis deux ans, le citoyen Bissolo et moi, nous nous trouvions en face l’un de l’autre dans toutes les manifestations ; à l’entrée, à la sortie de toutes les réunions, en tête de tous