Page:Anatole France - M. Bergeret à Paris.djvu/287

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et le mollet tendu. Jean Mouton allait derrière, gras et frisé. Toute la ville retentissait de leur cocorico et de leur bêe, bêe, bêe ; car ils étaient éloquents. J’ouïs, un jour de cet hiver, Jean Coq qui disait :

» — Il faut faire la guerre. Ce gouvernement l’a rendue inévitable par sa lâcheté.

» Et Jean Mouton répondait :

» — J’aimerais assez une guerre navale.

» — Certes, disait Jean Coq, une naumachie serait congruente à l’exaltation du nationalisme. Mais ne pouvons-nous faire la guerre sur terre et sur mer ? Qui nous en empêche ?

» — Personne, répondait Jean Mouton. Je voudrais bien voir que quelqu’un nous en empêchât ! Mais auparavant il faut exterminer les traîtres et les vendus, les juifs et les francs-maçons. C’est nécessaire.

» — Je l’entends bien ainsi, disait Jean Coq, et ne partirai en guerre que lorsque le sol national sera purgé de tous nos ennemis.