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LA MORT DU SINGE


À cause de la fièvre aux souvenirs vibrants
Et du jeûne qui donne aux âmes l’allégeance,
Grâce à cette suprême et brève intelligence
Qui s’allume si claire au cerveau des mourants,

Ce muet héritier d’une race stupide
D’un rêve unique emplit ses esprits exaltés :
Il voit les bons soleils de ses jeunes étés,
Il abreuve ses yeux de leur flamme limpide.

Puis une vague nuit pèse en son crâne épais.
Laissant tomber sa nuque et ses lourdes mâchoires,
Il râle. Autour de lui croissent les ombres noires :
Minuit, l’heure où l’on meurt, lui versera la paix.


1872.