Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/124

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sirs d’un monde qui se retrouve chaque soir dans une maison ou dans une autre est une foule d’idées, d’anecdotes et de conversations en commun, où l’on continue le lendemain les propos joyeux ou intéressants de la veille. Nous avions alors une vraie société, diverse et une à la fois, et qui réunissait tous ceux qui ont eu de nos jours quelque célébrité.

Mais, malgré ma vive affection pour la duchesse d’Abrantès et le plaisir que j’avais à retrouver chez elle des personnes que j’aimais, ses réunions avaient pour moi quelque chose de pénible ; un sentiment profond de la tristesse qu’elle essayait de cacher et du malheur qu’elle s’efforçait inutilement à vaincre me prenait le cœur et occupait ma pensée tout le temps où j’étais dans son salon. Elle avait quitté son appartement de la rue de Rochechouart, où l’élégance, les fleurs, les arbres, tenaient lieu de luxe et le remplaçaient, et elle était venue habiter, rue de Navarin, un petit logement moderne dans une de ces maisons neuves qui ne sont ni belles ni commodes. Elle qui avait eu un des plus beaux hôtels quand son mari était gouverneur de Paris, elle en était réduite à cet