Page:Andersen - Contes d'Andersen, traduit par Soldi, Librairie Hachette et Cie, 1876.djvu/275

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res, qui poussaient dans un grand bassin au-dessous de plusieurs jets d’eau.

Dès lors, la petite sirène revint souvent à cet endroit, la nuit comme le jour ; elle s’approchait de la côte, et osait même s’asseoir sous le grand balcon de marbre qui projetait son ombre bien avant sur les eaux. De là, elle voyait au clair de la lune le jeune prince, qui se croyait seul ; souvent, au son de la musique, il passa devant elle dans un riche bateau pavoisé, et ceux qui apercevaient son voile blanc dans les roseaux verts la prenaient pour un cygne ouvrant ses ailes.

Elle entendait aussi les pêcheurs dire beaucoup de bien du jeune prince, et alors elle se réjouissait de lui avoir sauvé la vie, quoiqu’il l’ignorât complètement. Son affection pour les hommes croissait de jour en jour, de jour en jour aussi elle désirait davantage s’élever jusqu’à eux. Leur monde lui semblait bien plus vaste que le sien ; ils savaient franchir la mer avec des navires, grimper sur les hautes montagnes au delà des nues ; ils jouissaient d’immenses forêts et de champs verdoyants. Ses sœurs ne pouvant satisfaire toute sa curiosité, elle questionna sa vieille grand’mère, qui connaissait bien le monde plus élevé, celui qu’elle appelait à juste titre les pays au-dessus de la mer.

« Si les hommes ne se noient pas, demanda la