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populaire : l'émotion de chanteurs successifs s' ajoutant à l'inspiration de l'auteur primitif. La seule différence est qu'ici le résultat fut imprimé au lieu d'être chanté, et que les collaborateurs furent découverts par la seule curiosité littéraire des temps, car Miss Rutherford et Miss Elliot avaient essayé de s'en cacher. Enfin la célèbre tragédie de Douglas de Johu Home, que Burns, comme tous les Écossais, connaissait bien, était fondée sur une de ces ballades ^ Cette poésie était donc répandue et appréciée. Bien plus, elle était si active, si pleine de sève, si maîtresse des imagi- nations que, parmi des milliers d'autres, elle était en train de former, à ce moment précis, trois âmes qui devaient être entre les plus robustes et les plus riches de leur contrée.

C'est par la poésie et le paysage des Borders que ce grand garçon, déjà savant, à qui Burns avait prédit un avenir d'homme, avait senti s'éveiller en lui le goût des choses d'autrefois. Il avait été élevé au pied d'un de ces vieux peels romantiques, bercé par les vieilles ballades. Et lui-même a raconté l'inlluence de ces spectacles et de ces récits sur son âme, dans des vers tout bondissants d'émotions enfantines.

Oui, l'impulsion poétique me fut donnée

Par la colline verte et le clair ciel bleu.

C'était une scène nue et sauvage,

Où des escarpements nus étaient empilés rudement ;

Mais, ici et là , dans les intervalles,

Reposaient des touffes veloutées d'un vert adorable ;

Et l'enfant solitaire connaissait bien

Les retraites où le murailler poussait,

Où le chèvrefeuille aimait à ramper

Sur le rocher bas el le mur ruiné.

Je pensais que ces recoins étaient le plus doux abri

Que le soleil vît dans tout son cours 2.

Et en même temps il retrace les premières émotions que ce vieux peel, avec tous ses souvenirs guerriers, faisait naître en lui et qui peut- être ont déterminé le tour historique et romanesque de son génie.

Sans cesse, je considérais cette tour démantelée

Comme le plus puissant ouvrage de la force humaine.

Et je m'émerveillais, quand le vieux paysan

Enchantait mon esprit, par quelque conte

De maraudeurs qui, au grand galop.

Sortant du château éperonnaient leurs chevaux,

Pour renouveler dans le sud leurs rapines,

Bien loin, dans les lointaines Cheviot bleues.

Ils me semblait que les trompettes, les pas des chevaux

1 Alex. Garlyle. Autobiography, p. 233.

2 Walter Scott, Marmion. Introduction to Canto m, to William Erskine.