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et le mauvais vouloir. Le premier me lie à jamais. Mais je n'ai rien de l'épagneul dans ma nature ; et le second me guérirait bientôt loi-s même que j'aimerais jusqu'à la foliée» Cela tenait sans doute à beaucoup d'amour-propre.

Elle était franche et assez pour avouer que cette franchise venait d'un manque de contrôle sur ses impressions. Par là, elle disait avec raison qu'elle ressemblait à Burns. « Si j'avais été homme , j'aurais été comme vous. Je ne suis pas assez vaine pour me croire votre égale en capacités ; mais je suis formée avec une vivacité d'imagination et une force de passion peu inférieures... Tous deux nous sommes incapables de tromperie parce que nous manquons de sang-froid et de pouvoir sur nos sentiments. La dissimulation est ce que je n'ai jamais pu atteindre , même dans des situations oii il eût été prudent d'en avoir un peu-. » Cependant ses malheurs, l'observance d'une vie surveillée par mille regards et néces- sairement timide , avaient refoulé , et pour les points importants , ce naturel impétueux. « Les situations et les circonstances ont, cependant, eu sur chacun de nous les effets qu'on pouvait attendre. L'infortune a merveilleusement contribué à maîtriser la vivacité de mes passions , tandis que le succès et l'adulation ont servi à nourrir et à enflammer les vôtres^. » Cependant cette imprudence de nature se décelait en certains petits traits de conduite. Il y avait désaccord entre son esprit qui était juste et son tempérament toujours disposé à partir droit devant lui. Il en résultait de petites incartades de manières ou de paroles. Elle manquait un peu du don de propriété ; elle allait à l'étourdie. « La nature a été indulgente envers moi à plusieurs égards ; mais elle m'a refusé absolument une chose essentielle : c'est cette perception instantanée de ce qui est convenable ou qui ne l'est pas, qui est si utile dans la conduite de la vie. Personne ne peut discerner, avec plus de justesse, après, que Clarinda. Mais quand son cœur est épanoui sous l'influence de la bonté , elle perd tout pouvoir sur lui et souvent elle souffre durement au souvenir de son imprudence 3. » On sent là un manque de mesure, de réserve , une familiarité un peu excessive ou trop prompte de manières et de langage , qu'elle sauvait sans doute par de la bonne humeur. Cela devait se traduire parfois par une certaine hardiesse et une certaine désinvolture de langage. C'est à quoi sans doute fait allusion Chambers lorsqu'il dit qu'elle avait « un degré de raffinement et de délicatesse qui n'était pas excessif.» Cette liberté de mots, qui offensait dans un milieu calviniste, aurait pu être ailleurs de la verve et de la verdeur. On voit que cette disposition à l'excitabilité s'emportait parfois,

1 To Sylvander, 9lli Jan. n88.

2 To Sylvander, ist Jan. 1788.

a To Sylvander, 19tii Jan. nSS.