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meurtre de Sivrac qui n’est pas punit. Soiguons comme deux frères toi et moi, et fesons nous témoin contre quelques-uns de ces gueu qui y a ici ; conte P… ou G…, si tu veu ? Vois-tu avec ça on se sauvera, car ce meurtre de Sivrac est une affère abominable, que je regraite presque, par qu’elle n’a pas mit un sou dans ma poche : pui j’sortirons, et taras la moitié de nos cachettes. Faut que je te dise un bon tour de précaution que j’ai prisse : une vintaine de coquin viennent et de sortir du brick, et j’leur ai fait la langue. Ils vont assomer tout le monde dans les rus par vengeance. Ça ra l’effait de détourner l’attention de nous, et de faire tomber l’indignation des gens sur ces niais-là : voi-tu ça. Diable, çait dommage que tu mais trahit, j’pouvait encore faire une belle fortunne. Écri moi si tu veu t’arranger avec moi pour l’affère de Sivrac, ou sinon choisi que j’te tue.

Cambray.


« À cette épitre, voici à peu près comme je répondis : —

« Cambray, tu me reproches d’avoir manqué à mes sermens et d’avoir trahi mes camarades ; mais tu m’avais donné l’exemple, et tu me proposes encore une nouvelle trahison, bien autrement lâche, puisqu’elle serait fondée sur un mensonge. Longtemps tu as pu me séduire, me montrer la fortune et les plaisirs comme fruits de nos brigandages, abuser de ton influence sur moi, et me faire l’instrument de ta cupidité, mais je suis revenu de cette illusion, et j’ouvre enfin les yeux. Oui, je serai témoin du Roi, mais non pas contre des innocens que tu veux charger du meurtre de Sivrac ; je le serai contre toi, Cambray, et tu verras si j’ai une mémoire fidèle, lorsque je ferai mon récit. Il faut bien que tu sois un diable incarné pour te vanter d’avoir engagé les misérables qui ont été mis en liberté à assommer le monde dans les rues, pour détourner de toi l’attention publique. Tu me demandes pourquoi j’en agis ainsi ? voici ma réponse :

The Devil told me that I was doing well,
And afterwards that my deeds were chronicled in hell !

« Voilà le fait : je suis désabusé, et je me crois libéré de sermens dictés par le crime. C’est pourquoi je dirai tout, en me riant de tes menaces et de ta rage impuissante. Ne compte plus sur moi. Adieu !

« Waterworth.


« J’eus besoin de me faire violence pour me résoudre à faire parvenir à mon camarade cette lettre désespérante, à laquelle je reçus la réponse suivante :