Page:Annales de l universite de lyon nouvelle serie II 30 31 32 1915.djvu/283

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Henry Crawford se pique au jeu. Son premier dessein était seulement de se faire aimer ; bienlôt il désire plus encore, il aime Fanny et veut qu’elle consente à devenir sa femme. Sur un refus formel, il fait appel à l’autorité de Sir Thomas. Celui-ci, ignorant les sentiments de sa nièce, s’irrite de son attitude : Mr. Crawford est riche, il est aimable ; quelle raison une jeune fille sans fortune peut-elle avoir de refuser un tel parti ? Comme Fanny persévère dans sa résistance. Sir Thomas la renvoie chez ses parents. Elle apprendra là, au milieu de la gêne et du désordre, le prix de l’existence large et facile que lui offre Henry Crawford. Pendant son exil — car elle est maintenant une étrangère dans la maison paternelle — Fanny commence à envisager avec moins de répugnance l’idée d’épouser Mr. Crawford. Elle sait d’ailleurs qu’Edmond est resté attaché à Mary et ne sera pas repoussé lorsqu’il demandera sa main. Mais le volage Henry ne sait pas supporter l’épreuve de l’absence. Il rencontre Maria à Londres, et entraîné malgré lui par l’attachement évident de la jeune femme, s’enfuit avec elle. Cette fuite, qui déshonore les Bertram aux yeux du monde, éloigne à jamais Edmond de Mary Crawford. Fanny, qui aurait épousé Henry s’il avait su plus longtemps demeurer digne d’elle, peut désormais continuer à donner à Edmond toute sa tendresse. Puis, le temps faisant son œuvre, Edmond comprend enfin que c’est auprès de Fanny qu’il trouvera le bonheur.

Avec une intrigue plus complexe que les premiers romans, une étude de caractères plus poussée, moins de vivacité dans le dialogue mais plus de nuances et de variété, « Le Château de Mansfield » est l’œuvre d’un auteur arrivé à la pleine et délicieuse maturité de son talent. Tout ce qu’il y avait d’un peu sec, d’un peu âpre, dans les fraîches et brillantes pages d’« Orgueil et Parti pris » ou de « L’Abbaye de Northanger » a disparu pour faire place à une atmosphère limpide et douce où tout est harmonisé, fondu, où le ridicule même est sans impatience et sans