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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

bon vous fâcher ? Je vous ai demandé quels souliers il fallait tailler, et vous m’avez dit : « Grands et petits, comme les bêtes que le berger mène aux champs. » C’est ce que j’ai fait, vous le voyez bien. – Ce n’est pas ce que j’entendais, dit le maître : je voulais dire de tailler des souliers grands et petits, et de les coudre les uns après les autres. – Si vous m’aviez dit cela, dit Ulespiègle, je l’aurais fait volontiers, et je suis prêt à le faire. » Ulespiègle et son maître se raccommodèrent. Le maître pardonna l’affaire du cuir gâté, à la condition qu’Ulespiègle ferait ce qu’il lui commanderait. Puis il tailla des souliers, et les donna à Ulespiègle en disant : « Tiens, couds-moi ces souliers, les petits après les grands. » Ulespiègle promit de le faire, et commença à coudre. Son maître sortit tout en colère, se promettant de surveiller Ulespiègle et de voir au retour ce qu’il aurait fait, et s’il aurait exécuté ses ordres comme il l’avait promis. C’est ce que fit en effet Ulespiègle. Il prit un petit soulier et un grand, les fourra l’un dans l’autre et les cousit ensemble. Lorsque le maître revint en tapinois, il vit qu’Ulespiègle cousait les souliers l’un dans l’autre ; il lui dit alors : « Tu es un bon serviteur ; tu fais ce que je commande ! » Ulespiègle répondit : « Celui qui fait ce qu’on lui commande ne doit pas être battu. – Oui, mon cher garçon, dit le maître, mes paroles étaient telles, mais ce n’est pas ce que j’entendais. Je pensais que tu ferais une paire de petits souliers, puis une paire de grands, ou bien les grands d’abord et les petits ensuite. Tu fais suivant