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Les aventures

Mais à présent que la quantité de mes grains augmentoit, j’avois véritablement besoin d’élargir ma grange pour les loger, car mes semailles avoient été suivies d’un si grand rapport, que ma dernière récolte monta à vingt boisseaux d’orge, & tout au moins à une pareille quantité de riz : si bien que dès-lors je me voyois en état de vivre à discrétion, moi qui depuis long-tems faisois abstinence de pain ; c’est à-dire depuis que je n’avois plus de biscuit. Je voulus voir aussi quelle quantité de blé me suffiroit pour une année, & si je ne pourrois pas me passer avec une seule semaille.

Tout bien considéré, je trouvai que quarante boisseaux étoient tout autant que j’en pouvois consommer dans un an. Ainsi je résolus de semer chaque année la quantité que j’avois semée la dernière fois, espérant qu’elle me fourniroit du pain en assez grande abondance.

Tandis que ces choses se passoient, vous pouvez bien vous imaginer que mes pensées roulèrent souvent sur la découverte que j’avois faite de la terre située vis-à-vis de l’île ; & je ne pouvois la voir que je ne sentisse quelque secrette impulsion de m’y voir débarqué, considérant que le pays où je me voyois étoit inhabité ; que celui auquel j’aspirois étoit dans le continent ; & que de quelque