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Les aventures

terme, & de m’embarquer. Mais si elle vouloit bien parler pour moi, & m’obtenir de mon père la permission de faire un voyage sur mer, je lui promettois, en cas que je revinsse, & que je ne m’en accommodasse pas, de n’y plus retourner, & de réparer ensuite le tems perdu par un redoublement de diligence.

À ces propos, ma mère se mit fort en colère : elle me dit que ce seroit peine perdue de parler à mon père sur cette matière, qu’il étoit trop informé de mes véritables intérêts, pour donner son consentement à une chose qui me seroit si pernicieuse ; qu’elle ne concevoit pas comment j’y pouvois encore penser, après l’entretien que j’avois eu avec lui, & malgré les expressions tendres & engageantes dont elle savoit qu’il avoit usé pour me ramener ; en un mot, que si je voulois m’aller perdre, elle n’y voyoit point de remède ; mais qu’assurément elle n’y donneroit jamais son consentement, pour ne pas travailler d’autant à ma ruine ; & qu’il ne seroit jamais dit, que ma mère eût donné les mains à une chose que mon père auroit rejetée.

Quoiqu’elle m’eût ainsi refusé, néanmoins j’ai appris dans la suite, qu’elle avoit rapporté le tout à mon père, & que pénétré de douleur, il avoit dit en soupirant : « Ce garçon pourroit être heureux, s’il vouloit demeurer à la maison : mais