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de Robinson Crusoé.

démon aventurier, qui me forçoit à courir le monde, simplement pour courir. Il est vrai que je me plaisois fort à être le bienfaiteur de mes sujets, à leur faire du bien par ma propre autorité, sans dépendre d’aucun souverain ; enfin à représenter ces anciens patriarches, qui étoient les rois de leurs familles. Je n’avois pas des desseins plus étendus ; je ne songeois pas même à donner un nom à l’île ; mais je l’abandonnai comme je l’avois trouvée, n’appartenant proprement à personne, & sans établir aucune forme de gouvernement parmi mes gens. Quoique, en qualité de père & de bienfaiteur, j’eusse quelque influence sur leur conduite, je n’avois pourtant sur eux qu’une autorité précaire, & ils n’étoient obligés de m’obéir que par les règles de la bienséance. Passe encore, si j’étois resté avec eux ; les affaires auroient pu prendre un bon train : mais comme ke les plantois-là pour reverdir, sans remettre jamais le pied dans l’île, tout devoit tomber nécessairement dans le désordre. C’est ce qui arriva précisément, à ce que j’appris dans la suite, par une lettre de mon associé, qui y avoit envoyé de nouveau une chaloupe. Je ne reçus cette lettre que cinq ans après qu’elle avoit été écrite, & je vis